WordPress, ton univers impitoyable…
Comme des millions de site web, Kablages est propulsé par un logiciel open source dont vous avez surement déjà entendu parler : WordPress. Créé en 2003 par Matt Mullenweg sur la base d’un autre projet open source, appelé b2 (mais plus personne ne s’en souvient), WordPress est un logiciel écrit en PHP, qui utilise une base de données MySQL, et que l’on peut librement installer sur tout serveur sur lequel ces technologies ont été installées : aussi bien sur des machines fonctionnant sous Linux que sur des Mac ou des PC sous Microsoft Windows.
Simple comme un blog WordPress..
La beauté de WordPress, au-delà de sa simplicité d’usage, réside dans son architecture ultra modulaire. Comprenant un socle qui sert essentiellement à gérer la publication et la configuration du logiciel, WordPress peut être enrichi d’extensions (en anglais, plugins) – il en existe des milliers – disponibles en open source ou sur la base d’un modèle de license, et habillé par des thèmes eux-mêmes disponibles pour certain gratuitement, pour d’autres moyennant rétribution.
Depuis plus de 20 ans, grâce à la souplesse de son architecture et de son modèle d’enrichissement à base d’extensions et de thèmes, WordPress a réussi à dépasser la communauté de blogueurs qui s’y intéressait principalement à ses débuts, pour séduire des agences, disposant ainsi d’un outil simple et gratuit pour concevoir des sites web et assurer leur maintenance. On estime que près d’un site sur deux utiliserait ce CMS. Bref, WordPress est un succès planétaire incontestable.
La guerre est déclarée
Mais les arbres ne montent pas au ciel, et qui dit succès dit prise de tête…
Depuis quelques mois, la communauté WordPress traverse une crise dont on ne voit pas bien à quoi elle va mener. Cette crise oppose
- d’un côté Matt Mullenweg, créateur de WordPress et patron de Automattic, éditeur de logiciel qui dispose des droits d’un tas de logiciels et de sites, y compris Tumblr (vous vous en souvenez ?), Akismet (une extension WordPress qui filtre les spams), Gravatar (une autre extension qui gère nos avatars), Woo Commerce (une autre extension qui ajoute des fonctionnalités e-commerce à votre site WordPress) ainsi que WordPress.com, le site qui propose un service d’hébergement payant d’un site sous WordPress (car on peut installer WordPress soi-même ou se dire que c’est compliqué et s’appuyer sur des sites pré-installés et maintenus à jour)
- et de l’autre, WP Engine, un concurrent de WordPress.com, qui propose lui aussi un service d’hébergement de sites pré-installés sous WordPress, ainsi que d’une extension extrêmement populaire, intitulée Advanced Custom Fields, qui permet d’enrichir WordPress en lui permettant de gérer non seulement des pages et des articles de blog, mais n’importe quel format de données qu’on souhaite manipuler.
Bref, une guerre de sécession autour d’un butin open source, et des enjeux d’argent significatifs (mais pas si colossaux que celà), puisque si les revenus des deux entreprises restent raisonnables (de l’ordre de 500 millions de dollars annuels), les sites propulsés par ces plateformes représentent, eux, des revenus commerciaux encore plus élevés.
La bagarre a débuté il y a quelques mois déjà, à l’occasion de sa keynote en septembre 2024, durant Wordcamp, l’événement annuel de la communauté WordPress. Depuis, les choses se sont envenimées, Mullenweg ayant décidé de couper les accès de WP Engine au site WordPress.org où arrivent et d’où partent les mises à jour de WordPress et d’une grande part de ses extensions et de ses thèmes.
C’est quoi la suite ?
Il y a quelques jours, Mullenweg a annoncé qu’Automattic allait se mettre en congé pour quelques jours, voire un peu plus, on ne sait pas très bien pour combien de temps. Il n’en fallait pas plus pour mettre la communauté WordPress en émoi. Car quand une communauté de cette taille s’entre-déchire par le truchement d’avocats, cela ne fleure l’incertitude, qui, c’est bien connu, a une très mauvaise odeur, l’ordeur des mauvaises novuelles.
Que pourrait-il arriver ? Les juges pourraient-ils contraindre Automattic à découpler l’activité d’Automattic du développement de WordPress ? Pourrait-on voir l’univers WordPress se scinder en deux, avec deux branches WordPress qui deviendraient peu à peu incompatibles, au risque de complexifier la gestion des thèmes et des extensions ? Qu’adviendra-t-il de ces millions de site propulsés par wordpress en cas d’absence de mises à jour pendant plusieurs mois ? Et si les services de mises à jour étaient eux-mêmes coupés ?
Pour Kablages, il n’y a pas de risque à court terme. Mais moi qui ai déjà connu une migration de Serendipity à WordPress il y a quelques années, je peux vous assurer que certains risquent de faire grise en cas d’obligation de passage sur une autre plateforme…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec