La voix des robots a-t-elle un sexe?
A l’occasion de la Journée international des droits des femmes, Xavier Delaporte abordait ce matin une question intéressante: pourquoi la voix des assistants personnels du type Amazon Echo ou Google Home était-elle féminine? Les réponses qu’il apportait m’ont paru suffisamment intéressantes pour être partagées ici.
Première piste: les voix féminines rassureraient nos congénères. Souvenir de notre existence intra-utérine. Piste facile, mais probablement assez juste.
Seconde piste: HAL, l’ordinateur malveillant de 2001 Odyssée de l’Espace, avait une voix masculine. Les ingénieurs – qui sont tous des passionnés de SF, c’est bien connu – associeraient donc une voix féminine pour se prémunir des risques de rebellion de la machine contre l’espèce humaine. Voire.
Troisième piste: la féminité des voix associés aux services: celle des opératrices télécom, par le passé, en est un bon exemple. Tant qu’on y est, maintenons ce statut au fil du temps: qui dit service dit voix féminine. N’est-ce pas une forme d’asservissement déguisé?
Bien qu’intéressantes, ces pistes ne me semblent pas plus convaincantes. Rien n’est dit, par exemple, des aspects techniques: le spectre d’une voix féminine est-il différent de celui d’une voix d’homme? Oui, la fréquence fondamentale moyenne n’est pas la même, les voix de femmes sont plus aigües. Cela facilite-t-il la compréhension humaine, particulièrement dans le cas de voix de synthèse?
Autre question: le cerveau réagit-il de la même façon à une voix féminine ou masculine? Les travaux de recherche, comme la thèse d’Erwan Pépiot sur ce sujet, auraient pu être abordés.
On aurait pu également aborder le sujet par un autre biais, celui du mode de reproduction des voix. Sur certains appareils ou certains logiciels, il s’agit de voix de synthèse. Sur d’autres, il s’agit de messages préenregistrés – donc de véritables locuteurs humains. Qu’elle est l’incidence du choix de tel ou tel genre de voix sur le mode de reproduction?
Xavier Delaporte achevait son intervention sur une question fondamentale: pourquoi la voix d’un programme, ou d’un robot, devrait-elle avoir un sexe? Après tout, il s’agit de machines, donc a priori non sexuées. Pour quelles raisons associe-t-on un sexe à chaque voix que l’on entend, pourvu que le timbre ne soit pas métallique? Existe-t-il des voix sans sexes? Et si oui, à quoi ressemblent-elles?
On le voit, le sujet abordé ici est vaste. Il touche des disciplines multiples – comme tout ce qui concerne les droits des femmes, par ailleurs, et c’est bien normal. Les apports scientifiques sur le sujet sont probablement d’une richesse encore importante…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec