Valery Giscard d’Estaing
Valery Giscard d’Estaing, ou VGE, aura survécu à Mitterrand et Chirac, décédé l’un d’un cancer et l’autre dans un état sénile. Mais il n’aura pas survécu au Covid-19. Triste fin pour un ancien président qui voulait incarner la modernité, et qui aura marqué les esprits comme étant celui qui fit entrer la France dans cette modernité souhaitée, notamment par une série de réformes (majorité à 18 ans, interruption volontaire de grossesse, divorce par consentement mutuel) qui le rendent, si ce n’est sympathique, du moins moderne aux yeux de mes compatriotes.
Il est vrai que Giscard est le premier président de la cinquième république à avoir bousculé le gaullisme, un peu comme s’il s’était introduit par effraction au sein de la droite, reléguant les vieux barons – et particulièrement Chaban – dans les coulisses de l’histoire. Polytechnicien, énarque, il n’en était pas moins un animal politique doté d’un esprit vif, et d’un sens affûté de l’opportunité.
Je me souviens encore de cette campagne. Pompidou était mort un mardi soir, nous l’avions appris, si mes souvenirs sont exacts, par une interruption des Dossiers de l’écran, que nous regardions en famille sur notre tout récent poste de télévision en noir et blanc. Nous étions en avril, la campagne fut courte, mais je me souviens encore des slogans qui fusaient à l’école primaire : « Giscard dans l’placard, Mitterrand président ». Boulogne-Billancourt n’avait pas encore complètement basculé à droite, et on pouvait encore croiser des enfants issus de milieux ouvriers à l’école.
Ce sont ces milieux-là qui n’ont pas compris le vent de modernité que voulait insuffler Giscard. Il faut dire que son mode de communication, bien que dépoussiéré des apparats des discours du Général, n’avait pas encore atteint le niveau de simplicité et de dépouillement – dépouillement calculé – de son successeur. Giscard incarnait une France bourgeoise, mais non populaire, et c’est cette dernière qui lui préféra Mitterrand.
Comment ne pas se souvenir, également, de l’affaire des diamants de Bokassa ? Le Canard s’en délectait semaine après semaine, et, bon dessinateur que j’étais, j’avais appris à croquer Giscard et à me livrer moi-même à quelques caricatures, alors que je finissais le collège, dans un établissement du 16ème arrondissement, où ce type de dessin choquait un peu plus.
Il ne faut pas non plus l’oublier, le septennat de Giscard fut aussi marqué par ses deux premiers ministres. Le virevoltant Chirac, qui contribua à sa victoire en trahissant son propre parti, ne resta que deux ans à ce poste. Son ambition démesurée, qui le mena à la Mairie de Pairs, puis à devenir le premier premier ministre de cohabitation, avant deux mandats présidentiels, saps probablement un peu de l’aura de VGE. Le second premier ministre, Raymond Barre, présenté comme le meilleur économiste de France – mais par qui ? – aura été celui de la formule obscène qui suivit l’attentat de la rue Copernic, où « périrent quatre français innocents ».
Démarré avec entrain quelques mois après le début de la crise pétrolière, le septennat Giscard pris fin dans le marasme et la maladresse, avec un chômage en forte progression, et la déception d’une catégorie de Français qui finiront par croire que le Parti Socialiste serait le plus à même de remédier à leurs problèmes.
Commencer avec de grands espoirs, finir en eau de boudin, n’est-ce pas finalement le lot de tous les mandats présidentiels , ici et ailleurs ?
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Je suis trop jeune pour avoir connu Giscard mais les trois réformes sociétales que vous citez (IVG etc) sont sans doute ses uniques réussites. Ensuite la France populaire qui a voté Mitterrand devait se rendre compte qu’elle avait porté au pouvoir les fossoyeurs de la gauche et de la République : depuis plusieurs décennies la vie politique française n’est qu’une suite quasi ininterrompue d’impostures et de trahisons.