Une surprise nommée Hugo Gaston
L’histoire aurait pu ne retenir, du parcours d’Hugo Gaston jusqu’au 8ème de finale de l’édition 2020 de Roland Garros, que son patronyme est l’anagramme de celui d’un autre joueur français, qui s’est particulièrement illustré en ces terres, Jo Wilfried Tsonga. Mais Hugo Gaston, 20 ans depuis quelques jours, a fait mieux que marquer la rubrique des faits divers. Il est parvenu à inquiéter la tête de série numéro 3 du tournoi, l’autrichien Dominic Thiem, récent vainqueur de l’US Open et en quête d’un second grand chelem lors de cette saison tennistique un peu particulière.
Il faut dire que cette édition 2020 est assez particulière. Bien évidemment, ce changement de date ne doit rien au hasard : il n’est que la conséquence de l’épidémie de Covid-19, et du confinement qui a complètement chamboulé l’agenda des événements sportifs un peu partout sur la planète. Un tournoi de Roland-Garros disputé en automne, c’est déjà assez extraordinaire comme cela. Mais il y a mieux.
Profitant des travaux réalisés durant les douze derniers mois pour couvrir le court central, ce tournoi, qui fait partie, avec le Tour de France, des deux principaux événements sportifs disputés en France mais dotés d’un retentissement mondial, peut enfin devenir indépendant de la variable météo – un changement majeur, pour qui a a déjà vécu le dépit d’une belle journée de spectacle tennistique gâchée par des trombes d’eau.
On aurait pu croire que l’absence de quelques têtes de série ayant déclaré forfait pour cause de pandémie profiterait aux joueurs français. Le Canard Enchaîné en avait même tiré un dessin humoristique ! Mais non, la première semaine du tournoi s’est une nouvelle fois révélée fatale pour les tennismen tricolores.
À l’exception d’Hugo Gaston.
239e joueur mondial au classement ATP, Gaston a bénéficié d’une invitation pour participer à son deuxième tournoi du grand chelem. Sorti dès le premier tour de l’Open d’Australie en début d’année, il a cette fois crânement saisi sa chance sur la terre battue de Roland Garros. Après avoir sorti un compatriote invité lui aussi, il a éliminé un joueur japonais classé 52e joueur mondial, avant de s’offrir Stanislas Wawrinka en cinq sets, dont un 6-0 final, et de revenir à deux sets partout après avoir été menu deux sets à rien par Dominic Thiem dimanche après-midi.
Et pourtant, son tennis ne paraît pas exceptionnel. Son service manque de puissance, tout comme son jeu de fond de court, et il n’a pas l’air d’être à son aise à la volée. Mais il dispose d’une arme fatale : une amortie dont il a usé près de 60 fois contre son adversaire hier. Un tennis tout en caresses, qu’on prend plaisir à regarder. Il fallait voir le joueur autrichien pester à l’écran, à chaque fois qu’il se faisait prendre en défaut par ce geste qui détonne, dans un univers du tennis qui s’est majoritairement livré à une course à la puissance, avec des services à plus de deux cents km/h, et des frappes de plus en plus lourdes, aussi bien chez les hommes que chez les femmes.
Hugo Gaston n’est peut-être qu’un feu follet, il ne fera peut-être illusion qu’une saison ou deux sur le circuit. Mais ce serait vraiment dommage qu’il n’aille pas plus loin.
Au tennis, comme dans la vie réelle, il est grand temps que les caresses prennent le dessus sur les baffes.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec