Une campagne peut en cacher une autre
Les campagnes se succèdent et ne se ressemblent pas. On se souvient de celle de 2007, qui vit pour la première fois une femme avoir des chances de l’emporter. On se souvient de celle de 2012, marquée par ce « candidat normal » qui s’opposait en tout au président sortant, ou du moins le croyait-on. On se souvient de celle de 2017, marquée par l’effondrement du PS, l’affaire des costumes et de vrai faux emploi de la femme de François Fillon, la menace d’une victoire de l’extrême-gauche ou de l’extrême-droite, et l’ascension audacieuse et fulgurante de candidat Macron.
De quoi se souviendra-t-on de celle de 2022 ? Difficile à dire, et en toute rigueur, il faut bien reconnaître que la campagne n’est pas encore achevée et qu’il reste encore quelques jours pour marquer les mémoires. Mais on peut tenter d’en cerner les contours.
D’abord une chose : une campagne peut en cacher une autre. Celle militaire qui se déroule en Ukraine occupe en effet bien plus de place dans les esprits et dans les médias, que celle politique qui doit permettre de déterminer le futur président français.
Mais d’autres aspects caractérisent la campagne de 2022. L’effondrement des partis traditionnels, ceux que Jean-Marie le Pen qualifiaient d’UMPS. La candidate socialiste, Anne Hidalgo, peine à dépasser les 5%, seuil de remboursement des frais de campagne, alors que celle des Républicains impressionne par son manque de charisme plus que par ses performances. La campagne de Valérie Pécresse donne l’impression d’un remake de La Chèvre, ce film bien connu qui repasse presque chaque année un dimanche soir sur TF1. Et l’annonce de son Covid hier s’apparent à un nième gag dans une campagne désatreuse.
Du côté des extrêmes, celle de droite se déchire depuis plusieurs mois et l’apparition du candidat Zemmour, qui semble avoir du mal à tenir dans la durée. Ses propos jadis plutôt favorables à Vladimir Poutine, sur les chaînes d’info en continu, l’ont semble-t-il marqué en fer, plus profondément que les rapports entretenus par la présidente du RN, jadis partie chercher des financements auprès du même individu. Il y a malheureusement encore qu’une grosse frange de la communauté juive qui porte ses espoirs sur Eric Zemmour…
Pour le reste, aucun candidat ne semble en mesure de faire sa fête au président sortant. Ni Mélenchon, dont la campagne s’apparente presque à un baroud d’honneur, ni le sympathique candidat communiste, ou le très peu passionnant candidat des verts.
Le président sortant n’a, dès lors, pas grand chose à faire pour se distinguer. Il l’a bien compris, et sa campagne s’apparente plutôt … à une absence de campagne. Ce sont ses ministres qui font le travail pour lui, qui n’apparaît que très peu, au prétexte qu’il doit tenir son rôle en pleine crise en Ukraine.
Cette absence de campagne du candidat Macron restera probablement le marqueur de la présidentielle 2022. Si, comme tous les sondages le confirment, il l’emporte, cela montrera aux futurs candidats qu’on peut gagner une présidentielle en minimisant le nombre de ses apparitions, en refusant de débattre avec les candidats, et en réduisant au strict minimum les frais de campagne.
À condition d’être le candidat sortant.
Une leçon que Nicolas Sarkozy, qui traîne encore le lourd fardeau des frais de la campagne 2012, ferait bien de méditer.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Ah la campagne c tellement mieux que la ville surtout par les temps qui courent et ceux qui vont courir!