Thinking fast and slow
Au hasard de mes lectures, il ‘arrive de tomber sur des livres dont je n’arrive plus à me détacher, qui m’accaparent pendant plusieurs semaines, tant ils sont captivants. Thinking fast and slow fait partie de cette catégorie là. C’est par une référence trouvée dans le livre sur les commerciaux que j’ai récemment lu, que je suis tombé sur cet ouvrage du Pr. Daniel Kahneman, prix Nobel d’économie israélien, récompensé en 2002. Disons le tout de suite, ce livre doit impérativement être lu par à peu près tout le monde.
De quoi traite-t-il? D’économie et de psychologie, principalement. Le credo de Kahneman, c’est que l’être humain n’est pas un acteur économique raisonné, et que des facteurs comportementaux ignorés jusqu’à il y a peu, influencent les théories économiques. Un exemple?
Imaginons que je vous propose le choix suivant:
1- soit je vous donne 500€
2- soit je jette une pièce en l’air et, si c’est face qui tombe, vous recevez 1000€, si c’est pile qui tombe, vous ne recevez rien.
Quelle option choisissez-vous? C’est bien, notez-la sur un bout de papier.
Maintenant imaginons que je vous propose le choix suivant:
a- soit vous me donnez 500€
b- soit je jette une pièce en l’air et, si c’est face qui tombe, vous me donnez 1000€, si c’est pile qui tombe, vous ne me donnez rien.
Quelle option choisissez-vous cette-fois? Notez-la encore sur un bout de papier.
Maintenant, ouvrez-bien les yeux: il y a de fortes chances que vous ayez choisi la combinaison 1-a, comme la plupart des lecteurs. Pourtant, d’un point de vue probabiliste, le premier et le second test sont rigoureusement identiques, à un bémol près. Dans le premier cas, il s’agit d’un gain, et vous avez préféré « assurer ». Dans le second cas, il s’agit d’une perte, et vous avez préféré tenter votre chance. La plupart des humains agissent ainsi.
Au coeur de son exposé, les travaux autour de la théorie des perspectives, ce qui lui vaudra son prix Nobel, et qui trouve sa principale illustration dans le tableau suivant, qui illustre des situations que nous rencontrons tous les jours.
- En haut à gauche, le fait que nous préférons tenir plutôt que courir, et encaisser un gain légèrement moindre s’il est assuré.
- En bas à gauche, le fait que nous aimons jouer à la loterie, où les chances de gagner gros sont relativement limitées.
- En bas à droite, le mécanisme des assurances: nous sommes prêts à payer une petite somme pour nous prémunir contre des risques importants
- En haut à droite, enfin, la case des comportements insensés, qui explique pourquoi nous préférons poursuivre dans les situations désespérées, au risque de tout perdre, plutôt que d’encaisser une perte franche mais plus limitée.
De tels exemples, ce livre en est bourré. Ils servent à illustrer les différents types de comportement qui caractérisent l’être humain dans ses postures économiques, en fonction des probabilités de gain ou de perte. Kahneman, dans son ouvrage dédié à son ami et collègue de travail disparu précocement Amos Tversky, pioche parmi de nombreuses études réalisées par des chercheurs, et qui montrent comment l’être humain agit parfois de manière déraisonnée, parce qu’il est influencé par ses réflexes face à ce qu’il considère être un risque ou un danger.
Kahneman propose un schéma explicatif pour cela. Il considère que le cerveau humain agit selon deux modes, qu’il appelle « Système 1 » et « Système 2 ». Le premier intervient lorsque l’on prend des décisions rapides, qui demandent peu d’efforts. C’est celui qui entre en oeuvre si je vous demande combien fait 2+2. Le second est celui qui intervient dans le cas de décisions plus réfléchies. Il entre en action si je vous demande combien fait 17×34.
Idéalement, nous devrions tous fonctionner en « Système 2 », en permanence, pour ne prendre que des décisions réfléchies. hélas, cela demande beaucoup plus de temps et d’efforts, et l’être humain est paresseux. Il préfère donner la main au « Système 1 », sans se rendre compte, parfois, que ses conclusions sont hâtives et peuvent nous mettre dans des situations risquées.
Je n’en dis pas plus. Précipitez-vous, si ce n’est déjà fait, pour acheter ce livre qui vous rendra un peu plus réfléchi et posé. Et comme le dit Richard Thaler, abondamment cité par Kahneman: « Buy it fast, read it slowly« .
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Une réflexion sur “ Thinking fast and slow ”