Rendez-vous dans 5 ans…
Les débats présidentiels passent et ne se ressemblent pas. On se souvient de celui de 2017, où Marine le Pen fut tonitruante et éructante, face à un Emmanuel Macron tout en mesure et logique. Et à quoi avons-nous droit hier soir ? À une situation presque inversée, où Emmanuel Macron s’est posé en puncheur souvent hautain, face à une Marine le Pen parfois hésitante, ayant du mal à trouver ses mots ou trébuchant sur des acronymes dont peu d’entre nous savent à quoi ils correspondent.
Le bal des débutant(e)s
C’en était presque touchant. On se serait crû en plein débat pour l’élection des délégués de classe, entre le petit nouveau, deux ans d’avance et connaissant ses cours par coeur, face à la redoublante un peu attardée, qui ne réagissait même pas aux Scuds que lui balançait son adversaire. Quand l’un énonçait avec fierté les données de tel ou tel organisme, ou prétendait lire la Constitution française (faudra que je pense à en commander un exemplaire sur Amazon, tiens !) l’autre se défendait de devoir rembourser aujourd’hui encore le prêt contracté pour couvrir ses frais de campagne (c’est bizarre, je croyais que ces frais étaient remboursés par l’état, on nous aurait menti ?…).
Ce qui se jouait hier, ce n’était pas le combat entre l’arrogant Emmanuel Macron et la sympathique Marine le Pen, mais le combat entre deux visions de la démocratie. L’une, libérale, a la Liberté pour valeur suprême : liberté de penser, de jouir, d’entreprendre, quoiqu’il en coûte… L’autre, aux aspirations totalitaires, a la Nationalité pour emblème. Son maître-mot : la préférence. Je préfère mon frère à mon cousin, mon cousin à mon voisin, mon voisin à mon concitoyen, mon concitoyen au reste du monde., comme l’avait un jour dit le père de la candidate du RN.
Liberté, (égalité), nationalité
Jusqu’à présent, ces vingt dernières années, la première forme de démocratie l’a largement emporté sur la seconde. Mais à force de négliger l’égalité, le troisième dogme de notre nouvelle maxime nationale – Liberté, égalité, nationalité – cette démocratie libérale voit l’écart se réduire avec son adversaire. D’un 18% vs 82% au second tour face à Chirac en 2002, l’extrême-droite est passée à 34% vs 66% au second tour en 2017. Elle devrait dépasser, et peut-être même largement, les 40% des suffrages exprimés, dimanche prochain. Un 44%-56% qui fera frémir tous nos voisins européens.
Encore cinq années à ce rythme, et l’écart sera si faible, qu’il sera difficile aux candidats libéraux de 2027 – Macron ne pouvant pas représenter une 3e fois – de faire la différence.
Rendez-vous dans 5 ans.
Même heure, même jour.
Même pomme.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec