Pourquoi ne pas courir ?
Il y a quelques années, j’ai écrit un article intitulé « Pourquoi courir ?« , qui vantait les mérites de la course à pied. À cette époque, je m’étais promis d’écrire un article symétrique, qui prendrait le parti inverse. J’ai longtemps repoussé la rédaction de cet article, sans toutefois abandonner l’idée. Il fallait qu’un jour ou l’autre j’écrive ce texte un peu exutoire. C’est désormais chose faite.
Voici donc quelques bonnes raisons pour ne jamais vous mettre à courir.
- Courir, c’est chiant. Je suis désolé pour l’entrée en matière, mais je crois que c’est la principale raison pour laquelle tant de gens ne courent pas, ou si peu. Courir, c’est particulièrement ennuyeux et monotone. Il n’y a d’ailleurs qu’un seul sport qui puisse tenir la comparaison : la natation. Les aller-retours sur une ligne d’eau sont ce qui me paraît le plus proche de l’expérience du macadam. Et dire que j’ai pratiqué ces deux sports pendant des années !…
- Courir, c’est moins fun que bien d’autres sports. Notamment par rapport aux sports d’équipe comme le football. Croyez-moi, pour avoir pratiqué les deux types de sports ! Je donnerais tous les semi-marathons du monde pour ne jouer ne serait-ce qu’une mi-temps d’un match de foot. Il manque, à la course à pied, la jouissance incroyable de l’action collective, et du but qui vient la concrétiser.
- Courir, ça fait mal. C’est même l’un des sports qui fait le plus mal, à mon sens. Pas une douleur recherchée ou acceptée, comme dans les sports de combats. Mais une douleur plus subtile, plus sournoise, comme celle qu’on ressent après l’entraînement de trop. À la cheville, au talon, derrière le genou, ou ailleurs. Ce peut être un début d’entorse, une rupture de quelque chose, une fracture de fatigue, une tendinite, voire une terrible périostite comme celle qui me taquine depuis deux ans, peu importe : les douleurs articulaires résultant de la pratique de la course à pied sont particulièrement tenaces.
- Courir ça fait mal … même là où on ne l’imagine pas. En particulier, à l’extrémité des tétons. C’est ce que j’ai découvert le jour où j’ai couru mes premiers quinze kilomètres, avec un équipement mal adapté (t-shirt en coton, quelle erreur) : j’avais la poitrine en feu, et mon t-shirt portait deux superbes auréoles ensanglantes. Et depuis, j’ai toujours fait attention à porter des vêtements adaptés.
- Courir, cela ne fait pas vraiment maigrir. J’ai pourtant longtemps crû qu’une pratique régulière de la course à pied permettrait de faire fondre les graisses et disparaître les poignées d’amour. Et bien au terme de plus de dix ans de pratique hebdomadaire de ce sport, il n’en est rien : j’ai conservé le même poids, pire, j’ai même tendance à en prendre si je ne fais pas attention. La raison en est simple : courir, ça puise dans les réserves, et ça donne faim. Après un semi-marathon, je peux dévorer deux entrecôtes sans aucun problème. Avec pain, huile et harissa. En réalité, si vous voulez maigrir, la seule solution, c’est de changer votre alimentation (en éliminant pain et pâtes, par exemple), et … de fermer sa bouche…
- Courir, c’est ingrat. Comme tous les sports, d’ailleurs : dès qu’on arrête de pratiquer pendant quelques semaines, on perd la condition physique, et on a l’impression de démarrer de zéro. Vous vous êtes entraînés pendant 6 mois comme un dingue, avalant kilomètre sur kilomètre, pour passer de 5mn30 à 5mn au kilomètre, bravo ! Puis vous vous arrêtez quelques semaines, et là, patatras ! Vous êtes revenus à vos performances d’il y a 6 mois !
- Courir, c’est devenu un peu trop à la mode. Il n’y a qu’à voir le nombre de gens qui font des tours de lacs, des tours d’hippodromes, des aller-retours le long de la seine, ou ailleurs. Le weekend comme en semaine, le matin ou le soir, une foule de gens habillés de manière bizarre, portant short, fuseau, t-shirt fluo ou tout autre accoutrement, parcourent les rues du monde, en haletant, suant et crachant. C’est d’un commun !
- Courir, c’est devenu un peu trop à la mode (bis). Il fut un temps, sûrement, où courir une grande course, genre Paris-Versailles, marathon de Paris ou de New-York, relevait du rêve et de l’expérience initiatique. Mais ce temps là est révolu (et je ne parle pas de la crise Covid) : il n’y avait qu’à prendre le départ d’une telle course ces dernières années, à 80 ou 100€ par personne, pour se rendre compte que c’est vraiment surfait. Poireauter trois quart d’heures dans un sas de départ, avant de se retrouver propulsé, puis mêlé à une foule dense et compacte, à se bousculer aux points de ravitaillement, pour le seul bénéfice de garder une médaille et un t-shirt souvenir.
- Courir, c’est faire un compromis avec la météo. Et comme chacun sait, faire un compromis avec la météo, ça marche souvent très mal. Tenez, par exemple, quand il fait froid, du genre 0 ou 1°C : vous vous couvrez, de manière à ne pas prendre froid. Belle erreur, car au bout de quelques kilomètres, vous transpirez à chaudes gouttes. Et si vous anticipez cette hausse de température, il vous faudra affronter un froid piquant tout au long des premiers kilomètres, ainsi qu’à chaque fois que vous ferez une pause ou prendrez le vent de face. Résultat des courses : un sacré rhume à la clef !
Comme vous le voyez, il y a bien des raisons pour ne pas courir, ou ne pas même envisager de le faire.
Mais par les temps qui courent -c’est le cas de le dire – il y a au moins une raison de courir qui peut contre-balancer les arguments précédents : c’est l’une des rares activités qu’on eut pratiquer en plein air, sans devoir porter un masque…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec