Non, l’Angleterre n’est pas l’Italie !
J’ai déjà dit sur ce blog tout le bien que je pensais du magazine The economist : la richesse de ses analyses, la diversité des sujets qu’on y aborde, l’humour au second degré qui transparaît souvent dans certains des articles qu’on y lit, et même la finesse de ses couvertures. Mais je dois dire que la dernière couv de cet hebdomadaire m’a particulièrement surpris. Son titre : Welcome to Britaly.
Sorti des rotatives quelques heures avant la démission de Liz Truss – j’ai souvent remarqué que pour atténuer la portée des critiques du Canard, les grandes décisions politiques en France étaient prises dans la nuit de mardi à mercredi, en serait-il de même au Royaume-Uni avec The Economist ? – ce numéro anticipe la prochaine sortie de route de l’ex première ministre. Mais au-delà de ce pronostic facile à établir, l’hebdomadaire économique dresse un parallèle saisissant entre l’Angleterre et l’Italie, rappelant en préambule qu’il y a une dizaine d’années, la même Liz Truss et son éphémère chancelier de l’échiquier avaient contribué à un pamphlet intitulé Britanny unchained, invitant leur pays à changer de politique économique, sous peine de déclin probable, de ressembler à l’Italie.
Et de citer quelques traits communs entre ces deux pays, comme l’instabilité politique – le Royaume-Uni a connu quatre premiers ministres en à peine plus de trois ans, un rythme incroyable si on le compare au rythme des mandats des quatre ou cinq décennies précédentes – ou comme le fait de devenir le jouet des marchés obligataires, ou de traverser une période de faible croissance qui semble se prolonger indéfiniment.
Il est vrai que nos amis britanniques partagent quelques caractéristiques communes avec nos voisins italiens. Ces deux pays ont connu, par le passé, de meilleurs jours. Tous deux ont été de glorieux empires, et ont dominé une large partie du monde connu. Sur le plan sportif, tous deux revendiquent la paternité du football, un sport qui lui aussi a changé la face du monde. Mais la comparaison s’arrête évidemment là, et je trouve que The Economist pousse le bouchon un peu loin.
L’instabilité politique par exemple, n’est pas le fait de gouvernements mis en minorité à l’assemblée, mais de l’incapacité du parti conservateur à se ranger derrière une figure à la fois reconnue et appréciée. De même, si l’Angleterre subit les foudres du marché obligataire, ce n’est pas tant pour des raisons structurelles, que la décision de l’ex première ministre. Le brexit n’a rien à voir avec la dérive néo-fasciste en cours à Rome. Berlusconi n’est encore pas monté sur le trône, et les anglais n’ont rien qui ressemble de près ou de loin à la mafia.
En réalité, le Royaume-Uni a connu pires situations par le passé, sans avoir jamais succombé à ses faiblesses. C’est même plutôt l’inverse qui s’est en général produit : c’est en période de crise que les anglais sont les plus forts, les plus combattifs. L’histoire nous l’a montré à plusieurs reprises.
C’est juste une question de temps.
Et de leadership.
D’ailleurs, n’est-ce pas un mot d’origine anglaise ?…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec