Mon beauf à l’assemblée
L’émission matinale de France Culture était consacrée, aujourd’hui, à la forte augmentation des sanctions prises contre les députés, pour des comportements irrévérencieux, voire purement et simplement violent et agressif de certains députés issus, il faut bien l’avouer, de deux partis politiques principalement. On se souvient des propos racistes d’un député RN, qui avaient valu quinze jours d’exclusion à son auteur. On a eu droit, ces jours-ci, à un tweet d’un député LFI posant, le pied sur un ballon représentant la tête d’un ministre, puis à la qualification du même ministre d’assassin par un autre député LFI.
Carton jaune, carton rouge
Au total, on est déjà à 10 sanctions contre des députés depuis le début de la mandature il y a moins d’un an, alors qu’il n’y avait eu que 15 sanctions prononcées lors de la précédente. Et encore, les sanctions avaient été prises pour des motifs simplistes, comme le port d’un maillot de football pendant une séance. On est loin des écarts de comportement actuels.
Quelle est la raison de ce phénomène ? Est-ce que cela tient à la qualité des parlementaires, ou bien est-ce que cela s’explique par une sensibilité accrue de la présidente et du bureau de l’Assemblée nationale ? Probablement les deux mon capitaine. Ce n’est pas forcément le fait d’être un nouveau député qui provoque de tels dérapages. On se souvient que le mot d’ordre de Marine le Pen, en arrivant avec ses troupes, c’était avant tout de ne pas faire de dérapage, d’offrir un nouveau visage de son parti. Son pari est, dans l’ensemble, assez réussi, et c’est plutôt du côté de LFI qu’on voit fleurir les comportements sanctionnables.
L’invité de la matinale de France-Culture imputait ces comportements à plusieurs origines. Il y a, tout d’abord, l’explosion des partis politiques, de moins en moins capables de tenir leurs troupes. Mélenchon a beau prétendre être le chef, il se fait déborder de plus en plus souvent. Il y a également la culture du tweete, de l’esclandre à tout prix, qui a d’ailleurs toujours existé dans la culture parlementaire. Mais auparavant, l’esclandre prenait d’autres proportions, et se déroulait avec des formes d’éloquences que ne permet pas le format sur 280 caractères.
Si vis pacem para bellum
Il y a également, et cela est plus surprenant, une raison indirecte : c’est la fin du cumul des mandats. L’invité de la matinale rappelait qu’autrefois, un parlementaire arrivait à l’Assemblée nationale à l’issue d’un long parcours initiatique, l’amenant à prendre peu à peu conscience des responsabilités qui lui incombent, au sein des institutions de la République, quelle que soit leur taille.
De nos jours, les parlementaires sont de plus en plus issus de la vie civile ou associative. Leur marque de fabrique, ce n’est plus le débat ou la négociation, c’est l’invective et le coup de poing. L’ancien conseiller municipale, qui devenait maire, puis député, a été remplacé par un militant associatif désireux de faire reconnaître la justesse de son combat au sein d’un large public, et non de représenter sa ville ou sa région.
On a non seulement les députés qu’on mérite, mais aussi les débats qui en découlent. Il ne faut pas s’attendre, dans ce cas, à ce que les échanges au sujet de la réforme des retraites prennent une forme plus élaborée que ce à quoi nous avons droit depuis quelques jours.
Comme disent les anglo-saxons, garbage in, garbage out.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec