Michel Serres, le philosophe
Du philosophe et historien des sciences Michel Serres, je n’ai malheureusement pas lu grand chose, si ce n’est Petite poucette qui ne m’avait pas fait une énorme impression. Mais je garde le souvenir des entretiens qu’il livrait chaque semaine sur France Info, et que nous écoutions parfois, à table, le weekend, en famille, autour de la soupe qui vient ponctuer le repos dominical.
Dans l’émission « le sens de l’info« , il répondait avec gouaille aux questions que lui posait le journaliste Michel Polacco. Il y faisait preuve de beaucoup d’humour, d’une culture sans limites, et d’une certaine capacité à parler de presque tous les sujets. Un humaniste moderne, en quelque sorte. Probablement l’un des derniers.
Et puis de Michel Serres, je garderai un autre souvenir: cette photo, inoubliable, en compagnie d’Aurore Bergé. Tous deux étaient invités à une émission de Thierry Ardisson, et la députée fraîchement élue, était arrivée sur le plateau dans une tenue d’une étrange légèreté, alors qu’il faisait un froid polaire dehors. En plus d’être fin et cultivé, Michel Serres appréciait donc tout ce qui peut apporter un peu de plaisir, ne serait-ce qu’un fugace regard croisé sur le décolleté de sa voisine. Michel Serres, non content d’être philosophe, prenait semble-t-il la vie avec philosophie…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
En regardant ce que l’on dit de Michel Serres je me suis demandé, aussi : était-ce un grand philosophe, ou seulement quelqu’un de sympathique ?
En lisant Edgar Morin j’ai compris que sa popularité n’avait rien à voir avec son oeuvre : nous faisons le contraire de ce qu’il désire pour nous. Il me semble aussi que nous n’avons rien compris de Michel Serres, mais que nous le trouvions décoratif.
Il paraît avoir eu une position à l’opposé de celle d’Alain Finkielkraut. J’ai tendance à croire que les deux ont raison, quant ils critiquent l’autre, mais ont tort, fondamentalement. Les deux se rejoignent dans l’immobilisme. Ce dont on a besoin, ce n’est pas d’une déploration de ce qui nous arrive ou d’une confiance aveugle en l’avenir et en l’espèce humaine. C’est d’une analyse de la situation, de ses mérites et de ses dangers, et d’une philosophie du changement.
Parfaitement d’accord, il y a de la place pour un philosophe du changement. Es-tu prêt à la prendre?
Au dessus de mes forces ! Et encore plus de mes compétences.
Alain Finkielkraut n’est pas du tout le philosophe réactionnaire dépeint par Laurent Joffrin et la France Insoumise. Robert Musil écrivait « Être moderne _ c’est créer son époque, c’est-à-dire lutter contre les neuf dixièmes de ce qu’elle représente ». Finkielkraut a parfois été traité de réactionnaire, par le plus grand des illogismes, parce qu’il dénonçait certaines dérives réactionnaires et rétrogrades de notre époque. Inversement Serres a été qualifié (d’une manière tout aussi illogique ) de moderne alors qu’il ne comprenait pas grand chose au monde contemporain et vivait encore dans une époque révolue. Son optimisme était un peu comparable au déni de réalité de Pangloss le personnage créé par Voltaire dans « Candide ».
Moi, je retiens le tintinologue.
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