Michel Barnier, victime collatérale du procès des assistants parlementaires du FN ?
Pauvre Michel Barnier !
Il vient d’entrer dans le livre des records pour avoir exercé le plus court mandat de premier ministre de la Ve république.
Michel Barnier, le Clark Kent des élus LR
Avouez que c’est grotesque, et un peu réducteur, pour quelqu’un qui fait de la politique depuis plus de 50 ans, qui a été député, sénateur, président de Conseil général, député européen, ministre à de multiples reprise (environnement, affaires étrangères, agriculture), commissaire européen et même négociateur en chef de l’UE pour gérer le Brexit. Bref, un super politique, le Clark Kent des LR, on se demanderait presque s’il n’avait pas un pyjama bleu caché sous son costume. Un premier ministre de rêve, nommé au terme d’un processus de sélection de plusieurs semaines (face, il est vrai, au pressing du NFP pour placer sa candidate Lucie Castets), qui avait le profil idéal pour gérer une assemblée qu’on savait déjà ingérable, sans aucune majorité nette, avec trois blocs aussi peu enclins à faire des alliances qu’un trio d’attaquants en manque de réalisations au moment de tirer un penalty…
Et pourtant, c’est ce surhomme qui vient de se prendre la deuxième motion de censure de toute la Ve république. La première, c’est un de ses augustes prédécesseurs qui se l’étaient mangée, un certain Georges Pompidou, qui se rattrapa fort bien quelques années plus tard. En revanche, pour Michel Barnier, les carottes sont cuites, et l’heure d’une digne retraite a sonné.
On retiendra qu’il y avait de quoi se faire du mouron. Car ce n’est pas une, mais deux motions de censure qui avaient été présentées hier. Une pour chacun des deux affreux de l’assemblée, une belle motion signée LFI, et une aussi belle motion signée du RN. Personnellement, je n’y croyais pas vraiment, et pensais même qu’aucun des frères ennemis ne soutiendrait la motion de l’autre. On trouvait même dans le texte de la motion LFI un paragraphe fait sur mesure pour que les députés RN expliquent leur abstention :
Pourquoi des députés RN soutiendraient ils une motion issue d’un groupe qui a choisi de faire barrage … au RN ?
L’affaire dans l’affaire dans l’affaire dans…
Pour comprendre ce revirement du RN, qui n’avait pas soutenu la première motion de censure LFI il y a quelques mois, il faut se souvenir de ce qui a fait l’actualité politique des dernières semaines : l’affaire des assistants parlementaires du FN, ancêtre du RN, au Parlement européen. Rappelons sommairement les faits. 25 députés européens issus des rangs du FN, parmi lesquels Marine Le Pen, sont accusés d’avoir fictivement employé des membres de leur parti comme assistants parlementaires. Des méthodes couramment utilisées par d’autres partis politiques il y a quelques années, souvenez-vous de l’affaire Pénélope Fillon. Le financement de la vie politique, en France, ne tourne toujours pas rond.
Mais cette fois, les répercussions de l’affaire vont plus loin que la condamnation de quelques députés. Le procès a pris fin il y a une dizaine de jours, le parquet a requis une peine de 5 ans de prison dont 2 fermes à l’encontre de la présidente du RN, ainsi qu’une période d’inéligibilité de 5 ans, avec une mesure d’exécution provisoire, ce qui signifie que si la condamnation est prononcée, Marine Le Pen devra immédiatement exécuter sa peine, même en cas d’appel…
C’est cette raison, et uniquement cette raison, qui a poussé le RN à contribuer à la chute du gouvernement, en soutenant la motion présentée par LFI. Et qui le poussera à faire tomber les gouvernements suivants, en créant une sorte de chaos politique, en compagnie des députés LFI, de manière à développer un rejet massif d’Emmanuel Macron et provoquer une présidentielle anticipée.
Avant le 31 mars prochain, de préférence.
De manière à bénéficier d’une immunité présidentielle en cas de victoire…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec