Mathematica

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De toutes les matières enseignées à l’école ou à l’université, les mathématiques sont bien celles sur lesquelles les avis sont les plus tranchés. Personne ne reste indifférent aux quelques années passées à « faire des maths ». Si d’un côté « les forts en maths », petit cercle auquel je prétends humblement avoir appartenu quelques temps, s’en sortent avec d’excellents souvenirs, la grande majorité de l’espèce humaine garde de cette époque la sensation d’une peine injustement imposée. Et pourtant, cette immense majorité d’individus est capable de manipuler des concepts et des objets mathématiques qui les auraient faits passer, il y a quelques siècles seulement, pour des surdoués ou de redoutables magiciens, dignes du bûcher.

C’est en partant de ce constat étonnant, que David Bessis a eu l’idée de Mathematica, un livre qui est moins un livre sur les mathématiques, qu’un livre sur les mathématiciens, et sur les pistes, en termes de développement personnel, qu’on peut induire de leurs parcours respectifs.

Comment devient-on fort en maths ?

Le credo de David Bessis, c’est que les forts en maths ne le sont pas de naissance, mais le deviennent suite à un parcours initiatique qui peut être le fruit du hasard, la conséquence d’un défaut physique (comme ce mathématicien à la vue déficiente qui développe une compétence particulière pour la géométrie dans dimensions supérieures à trois), ou simplement du fait d’une méthodologie personnelle, comme c’est le cas pour René Descartes ou pour l’auteur lui-même.

Nous sommes tous, explique David Bessis dans Mathematica, capables de nous représenter mentalement un nombre aussi grand que 999 999 999, ou les différents cas d’intersection entre une droite et un cercle sur un plan. Or ces exercices mentaux qui nous paraissent simples aujourd’hui, auraient demandé des efforts prodigieux pour des contemporains des premiers penseurs grecs, ou de grands esprits du moyen-âge.

Et si nous y parvenons aisément de nos jours, c’est parce que très tôt nous avons été amenés à nous représenter mentalement des objets aussi abstraits. Nous nous sommes familiarisé avec eux, à l’école ou à la maison, en faisant coïncider deux mondes qu’on a tendance à opposer : l’intuition et la déduction logique.

D’où une règle simple : pour David Bessis, le meilleur moyen pour permettre à un large public d’acquérir une certaine aisance mathématique, et de mettre fin au rejet systématique de certaines classes de population, c’est de mettre un terme au débat qui oppose ces deux mondes. Il invoque, pour cela, le témoignage de grands esprits, d’Einstein à Grothendieck, qui ont tous, dans leurs écrits, expliqué leurs étonnantes capacités intellectuelles par cette capacité à faire confiance à leur intuition.

Témoignage personnel

Aussi étonnamment que cela puisse paraître, David Bessis a, me semble-t-il, parfaitement raison. J’en veux pour preuve ma manière personnelle de faire des maths. Tant que j’ai pu, avec une certaine aisance, me représenter mentalement les concepts manipulés – de la représentation des nombres en base 6, 7 ou 16 aux espaces vectoriels, de la topologie aux dénombrements – tout allait bien. Mais dès que j’ai abordé des domaines où je n’arrivais pas à trouver de représentation mentale, j’ai eu les pires difficultés, comme en cinématique, ou avec les distributions.

Et j’ai arrêté de faire des maths.

David Bessis formule son constat avec beaucoup d’humour, expliquant que les mathématiciens professionnels ne lisaient jamais de livres de mathématiques pour une raison évidente : soit ils ont déjà compris les concepts abordés et le livre est inutile, soit ils n’y pigent rien, et ce n’est pas en lisant qu’ils comprendront mieux.

Que les nuls en maths se rassurent : ils ont encore le temps de faire d’énormes progrès.

Et peuvent très bien commencer par lire Mathematica…

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