Loulek

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Il est des destins extraordinaires. Celui d’Israel Meir Lau, dit Loulek, en fait partie. Né en 1937, il ets le rejeton d’une lignée de rabbins surplus de trente générations. Son père, rabbin de Piotrkow après avoir été celui de Presov, ainsi que sa mère, périssent dans la Shoah – le hasard veut que les communautés des deux villes arrivent en même temps à Treblinka. Mais Israel Meir, ainsi que son grand-frère Naphtali, vont survivre. Par chance, par obstination, par une volonté divine, appelez cela comme vous le voulez, mais voilà, les deux enfants – Naphtali est né en 1926 – vont parvenir s’en sortir miraculeusement, et à rejoindre la terre d’Israel. L’aîné deviendra diplomate, le second … grand rabbin ashkenaze d’Israel de 1993 à 2003, perpétuant ainsi la lignée paternelle. Son fils David Lau a lui-même été grand rabbin ashkenaze de 2013 à 2024.

Un tel destin, celui du plus jeune survivant de Buchenwald, méritait d’être retracé, et c’est l’objet de ce livre d’un peu moins de 400 pages, abondamment illustré.

Israel Meir Lau commence par raconter la première partie de sa vie, l’occupation nazie, la Shoah décrite au travers du regard d’un enfant d’à peine 5 ans, puis la libération – il croisera le père de Kareem Abdul Jabbar qui faisait partie des troupes américaines venues libérer les camps. C’est pour répondre à l’injonction de son père de maintenir cette lignée fantastique que le grand frère fit tout pour préserver son petit frère. Les deux vont se retrouver un temps en France, hébergés dans un camp de l’OSE, avant de rejoindre ce qui va rapidement devenir Israel.

Pris en charge par des membres de sa famille ayant fait l’Alyah plus tôt, il va rapidement montrer des qualités exceptionnelles et étudier auprès des plus de grandes figures de l’enseignement religieux. Son parcours le mène ensuite à devenir grand rabbin de Netanya, puis de Tel-Aviv, avant de devenir grand rabbin d’Israel en 1993.

La seconde partie de l’ouvrage est consacrée à son activité en temps que rabbin. Plutôt que de raconter le quotidien, il se concentre sur des événements clefs, des rencontres marquantes, qui ont parfois contribué à l’ouverture de nouveaux canaux de communication, entre le jeune état et certaines grandes figures de la politique internationale, réticente à entamer des relations diplomatiques officielles avec Israel. Il est le premier grand rabbin d’Israel à rencontrer le pape (Jean-Paul II) ainsi que … Fidel Castro.

Israel Meir Lau dresse un récit honnête et sans compromission de ses différents échanges. Il rend un hommage vibrant à Itshak Rabin, qu’il a longtemps côtoyé dans le cadre de ses fonctions, et n’épargne pas certains interlocuteurs quand ceux-ci mènent un double langage. La précision de ces compte-rendus, qui nous laisse apercevoir l’étendue de la mémoire de ce personnage hors normes, est peut-être la partie la plus jubilatoire de ce livre.

Quoiqu’il en soit, Loulek est un livre qu’il faut lire et faire lire. Pour comprendre un peu plus ce que fut l’étendue de l’anéantissement du judaïsme polonais. Et pour suivre les traces d’un homme dont chaque propos mérite d’être médité.

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