Les réseaux sociaux sont-ils devenus un truc de vieux ?
C’est la question que Yann Gourvennec m’a récemment posé: tu ne crois pas que les réseaux sociaux sont devenus un truc de vieux? Il faut dire qu’il avait préparé le terrain, le bougre: un rapide sondage auprès de ses élèves (moyenne d’âge à peu près 22 ans), qui s’en sont enfuis ces dernières années. Alors, Facebook est-il devenu un outil de drague pour senior et jeune retraité?
Personnellement, je ne le crois pas. J’ai plutôt l’impression que plusieurs effets se combinent, donnant l’apparence d’un vieillissement de la population active sur les réseaux sociaux.
Le biais professionnel
Les élèves interrogés par Yann sont des élèves inscrits dans des filières de marketing digital: ils constituent une population particulière, de gens hypersensibles aux évolutions du web, attentifs à la protection des données personnelles, et probablement scandalisées par l’usage qu’on prête à Facebook sur ces mêmes données. Ils sont plus soupçonneux, gèrent jalousement leur identité numérique. Cela ne durera peut-être pas, mais dans la période actuelle, ils préfèrent sans doute prétendre que les réseaux sociaux, c’est pour les vieux.
Le biais fonctionnel
Les réseaux sociaux ont évolué, depuis quelques années déjà. Les fonctionnalités liées à la connectivité ont cédé le pas sur les fonctionnalités liées à la discussion: Facebook Messenger et WhatsApp sont plus populaires que la maison mère. Mais en passant du temps sur l’une de ces deux applications, on passe du temps … sur Facebook, qui collecte tout autant de données dans ses bases. Il faut bien en être conscient. Certes, Snapchat a capté quelques millions d’utilisateurs, mais ces derniers fuiront cette plateforme dès qu’ils comprendront l’inanité de ses usages et le potentiel de Facebook ou LinkedIn au quotidien.
Le biais sociétal
Les usages sur les réseaux sociaux varient d’un endroit à l’autre, d’un niveau d’éducation à l’autre, d’un cadre relationnel à l’autre. Il serait bien difficile de tirer des conclusions d’un échantillon de quelques centaines d’individus, quand on pense qu’un outil comme Facebook concerne plus de deux milliards d’individus. Alors certes, la croissance du nombre de nouveaux utilisateurs n’est pas aussi folle qu’aux débuts (les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, dit-on, dans les salles de marché). Mais les usages, eux, sont loin de s’être affaiblis. Au contraire, je pense que les utilisateurs sont de nos jours plus à l’aise avec l’interface d’un Facebook qu’ils ne l’étaient au tout début.
Le biais générationnel
Facebook n’a même pas quinze ans, LinkedIn à peine plus, et déjà on les enterre. C’est qu’à l’échelle du web, quinze ans c’est énorme, c’est presque 60% de l’âge du web (et cela ne fera que monter) si on considère l’accès ouvert au grand public, vers 1995. Du coup, on se dit que si ces sites existent depuis aussi longtemps, c’est qu’ils sont vieux (La Palisse n’aurait pas dit mieux). Cela ne veut pas dire que tous les utilisateurs sont vieux, bien au contraire. Dans certains pays, notamment en Afrique, les populations actives sur les réseaux sociaux ont une moyenne d’âge bien plus faible que dans nos pays occidentaux à la natalité déclinante. Et puis, il faut bien reconnaître que les jeunes ont souvent bien peu de choses à raconter par rapport à leurs ainés.
Alors, les réseaux sociaux sont-ils devenus un truc de vieux? Demandez cela à vos enfants, vous pourriez être étonnés…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Les réseaux sociaux sont probablement un « changement ». C’est-à-dire qu’il faudra du temps pour que la poussière retombe, et que l’on sache à quoi et à qui ils servent.
Ce qui semble certain, c’est qu’il y a un aspect spéculatif dans cette innovation. Cela encourage la recherche de nouveaux champions. Ils sont lancés à grand fracas, permettent quelques fortunes, puis se dégonflent. Il y a aussi des questions d’usage. Il y a des gens qui sont messagerie et d’autres réseaux sociaux.
Il est possible que les jeunes soient messagerie et, si j’en crois mes élèves, très inquiets de la protection de leurs données. (Réflexe que leur fait acquérir la surveillance de leurs parents ?)
Mais les jeunes d’aujourd’hui seront vieux demain. Si les vieux maintiennent leur usage des réseaux sociaux, les anciens jeunes feront comme eux. Et comme ce sont les vieux qui ont l’argent, l’économie n’en sera pas affectée.