Les porte-avions volants arrivent
J’ai toujours eu le sentiment que mettre une idée sur le papier pouvait largement contribuer à la concrétiser. La science-fiction a souvent non seulement précédé la réalité, mais l’a en quelque sorte façonnée. Mais en matière d’innovation, de nos jours, un bon écrit ne suffit plus. Les possibilités qu’offrent les logiciels de création 3D permettent d’aller encore plus loin, et de montrer, avant même les véritables phases de conception, ce à quoi pourront ressembler les objets du futur.
Fiction ou réalité, qui inspire l’autre ?
De ce point de vue là, l’univers cinématographique n’est pas en reste. Les gadgets futuristes de Star Wars ou des films Marvel contribuent à orienter l’imaginaire des Geo Trouvetou et Tony Stark en tout genre. Le dernier avatar, en la matière, est peut-être l’un des plus impressionnants qui soient : les porte-avions volants. Si vous avez déjà vu un épisode d’Avengers ou d’Iron Man, vous avez surement repéré ces monstres volants, conçus sur le modèle d’un classique porte-avions, augmenté d’énormes hélices qui le maintiennent en l’air.
Bien sûr, avant d’arriver à maintenir en l’air un tel engin, il se passera quelques décennies. Mais dites-vous bien qu’avant qu’aux premiers temps de l’aviation, nul ne pensait probablement à créer des bateaux capables de transporter des aéronefs. Il a fallu la prodigieuse et terrible accélération de la seconde guerre mondiale pour qu’un tel concept prenne vie à grande échelle.
Un porte-avions, c’est un nid à problèmes
À quoi pourrait servir un porte-avions volant ? Après tout, les bâtiments de type Charles-de-Gaulle ou USS Nimitz sont encore en service, et permettent de projeter, en quelques jours, une puissance de feu considérable. Certes, mais les porte-avions en mer ont aussi montré leurs limites. D’abord, ils coûtent cher, très cher. Leur construction prend plusieurs années, et au rythme où progresse la technologie, sont parfois dotés d’équipement obsolètes au moment de leur mise en service. Ils se déplacent relativement lentement, et constituent des cibles de choix à eux seuls. Surtout, ils concentrent en un seul point des équipages importants et du matériel si coûteux, que le risque d’en perdre un constitue à lui seul une bonne raison de ne pas en construire. D’ailleurs, si les Etats-Unis sont dotés d’une dizaine de tels appareils, la France ou la Russie n’en disposent que d’un seul en service.
À l’inverse, un porte-avion volant dispose d’une capacité de projection plus importante : il lui suffit de quelques heures pour apporter la menace de destructions massives. Bien sûr, il ne s’agit pas, dans pareil cas, de transporter le même type d’avion : aucun appareil volant ne peut porter une flotte d’avions de combats.
Mais si l’on remplace les avions de combat par des drones, le problème n’est plus le même. Des drones de petite taille, cela peut facilement être emporté par un aéronef capable de transporter des charges importantes … comme un A400 ou un Hercules C-130. Vous voyez où je veux en venir ?…
Bienvenue aux Gremlins
Et bien l’armée américaine y a pensé il y près de dix ans déjà. Un appel à projets a été diffusé par la Darpa dès 2014, et les premiers projets ont vu le jour. Les drones en question ont été baptisés du doux nom de Gremlins, en référence aux odieux personnages des films éponymes. Le site Opex360 en fait l’écho, ainsi que le numéro de The Economist de la semaine passée (drôle de sujet pour un journal économique, non ?).
L’intérêt d’un tel porte-avions s’amplifie avec l’usage de drones. Tout comme les armures d’Iron Man à la fin de l’épisode 2 (ou 3, je ne me souviens plus bien), les drones de combat peuvent communiquer entre eux et combiner des attaques simultanées qui ne laissent que peu de chances à des adversaires humains.
Un tel projet pose bien entendu quelques difficultés importantes, mais non insurmontables. Comme, par exemple, la possibilité de se rapprocher de leur base sans compromettre leurs conditions de vol respectives. Il faut s’approcher, se mettre en place et procéder, probablement, à des opérations de rechargement, en combustibles ou en armement. On peut même imaginer qu’un tel porte-avions embarque plus d’appareils que de rampes de lancement, et que les derniers drones en vol soient programmés pour se poser ailleurs que sur le « navire » qui les a transportés sur la zone de combats. Tout est, en réalité, envisageable, dès lors qu’on résout le problème de l’amarrage.
Les premiers vols de Gremlins ont déjà eu lieu.
Ce n’est plus de la science-fiction, et à peine de l’anticipation.
Et je suis à peu près certains qu’ils préfigurent ce que risque de devenir le combat aérien de demain.
Il ne nous reste plus qu’à leur trouver un nom.
Parce que porte-drones, ça manque un peu d’effet Waou…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec