Le paradis des prépas scientifiques
Pour le commun des mortels, les classes prépa, c’est un enfer qu’on ne souhaiterait même pas à son pire ennemi. Mais pour ceux qui ont connu passé deux ou trois années en prépa scientifique, les souvenirs sont souvent beaucoup plus nuancés. Par comparaison avec la première année de médecine ou la préparation du barreau, ou de l’internat, il me semble que les prépas scientifiques offrent un parcours nettement plus agréable.
Si ce n’est jouissif.
Bienvenue au paradis des matheux
Certes, on travaille d’arrache-pied. Mais tout au long de ces deux années, on a le sentiment de réels progrès, dans des matières qu’on a, a priori, choisies en connaissance de cause ; les maths. La physique, un peu aussi. Tout comme les sciences de l’ingénieur (mais pas le des-dus). Et même en chimie (je ne me prononce pas sur le reste…)Ce qui n’est pas le cas des autres concours que j’ai cités, où l’on se met à ingurgiter, par coeurs, des informations dont on a parfois du mal à saisir le sens.
Certes, me direz-vous, les ingénieurs ne passent par leur vie à résoudre des équations différentielles ou à se promener dans des espaces topologiques. Et la spécialisation qui vient avec l’école d’ingénieur n’a souvent que peu à voir avec les mathématiques ingurgitées en prépa. Mais avouons-le, le plaisir de ces exercices de khôlles, et de ces problèmes de maths, une fois résolus, est tel, que plusieurs décennies encore, ce n’est pas sans un certain délice que je retrouve certains de leurs énoncés.
Bienvenue au paradis virtuel
Et j’ai donc apprécié l’humour au second degré des créateurs du site CPGE paradise. Ce site, qui recense des cours et des énoncés en provenance de quelques classes préparatoires de Louis-le-Grand est une pure merveille. Il sert également de portail vers des contenus issus d’autres établissements, via la page Liens utiles.
Quand j’effectuai ma prépa il y a près de quarante ans, internet n’existait pas, et il fallait acheter des tas de livres pour collecter un tel trésor. Il y avait bien entendu ceux de mes profs, le livre d’exercice de mon prof de sup J-D Bloch et M. Andler, le cours en trois volumes de mon prof de spé Claude Deschamps (qu’on appelait du nom de ses deux co-auteurs, alors plus célèbres, Ramis et Odoux), ou les livres d’exercice d’un autre prof de spé, Flory, sans oublier les anciens livres de mon père, les livres de la collection U des frères Calvo. Il y avait la RMS, à laquelle on peut désormais s’abonner en version électronique.
Mais pour trouver un tel foisonnement d’énonces, de corrigés, d’exercices en tout genre, il fallait se lever tôt. Ou passer sa vie à demander à d’autres élèves de vous photocopier – ce qui était loin d’être gratuit, à l’époque, sans smartphone – les multiples énoncés et textes.
Désormais, c’est plutôt l’inverse. On nagerait presque en pleine obésité. On ne sait plus ou donner de la tête, tant il est possible de trouver de contenus de qualité. Et il faudrait presque disposer d’une sorte de coach pour nous guider vers les textes les plus utiles, au moment où l’on aborde telle ou telle question de cours.
Pour les sciences, avant la gloire
Mais ce qui me paraît le plus significatif, et qui caractérise bien cette notion de paradis terrestre et d’ambiance bon enfant qui règne en prépa, c’est que même s’il s’agit d’un concours, ou d’une série de concours, parfois très difficiles, tous les candidats savent, qu’in fine, leur objectif est le même, c’est de faire progresser la science, le savoir, la connaissance scientifique. D’où ce concept de partage au sein d’une large, très large communauté. Avec ces contenus diffusés sur Internet, on peut accéder aux cours de tel ou tel prof sans y assister (comme par exemple les exercices d’Alain Troesch) . Faire les exercices qu’il propose. Et même, parfois, profiter de ses astuces pour les résoudre. Un peu comme si, en Formule 1, le pilote d’une écurie pouvait profiter des conseils de l’écurie concurrente.
Dingue, non ?
Rien à voir avec l’ambiance en médecine, où des organismes privés viennent vendre, cher, très cher, des cours supplémentaires, ou bien qui remplacent carrément les cours dans les amphis, ou encore des coachings personnalisés pour réussir en première année. Où des élèves de seconde année revendent leurs propres cours aux élèves de première année, qui croient dur comme fer que cela va leur permettre de réussir…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Sur ce sujet, voir mon livre : Six ans pour grandir. Il est disponible sur Amazon Kindle :
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Bonne lecture !