Le Musée d'Archéologie Nationale
A une quinzaine de kilomètres de Paris, en plein centre-ville, se dresse le Château de Saint-Germain-en-Laye. C’est là que depuis près d’un siècle et demi se trouve l’une des plus belle collections archéologiques d’Europe, le Musée d’Archéologie Nationale.
C’est Napoléon III qui signa en 1862 le décret visant à la création d’un musée des antiquités celtiques et gallo-romaines. Au-delà de l’aspect éducatif ou culturel, son intention était vraisemblablement de rassembler en un unique lieu les traces d’un glorieux passé national, et notamment l’histoire de la Gaule. Nous étions alors à quelques années de la guerre de 1870, et l’idée de rassembler la nation face à un adversaire étranger et menaçant – la Prusse – passait peut-être par ce type d’initiatives.
Cent cinquante ans plus tard, on ne peut que louer cette initiative. Le Musée d’archéologie nationale rassemble quelques milliers de pièces réellement exceptionnelles, allant du Paléolithique à la Gaule mérovingienne. Il faut compter un peu plus de deux heures pour une visite rapide, et certainement beaucoup plus pour une visite détaillée.
Paléolithique et néolithique
La visite commence par une immense salle où sont réunis différents vestiges datant d’entre 500 000 et 8000 avant J.C. On y trouve une multitude d’outils (bifaces, galets, coquillages, dents ou os taillés) caractéristiques de cette époque. Certaines pièces proviennent de régions situées en France, d’autres de sites archéologiques à l’étranger, dont quelques moulages. Ces objets, bien que rudimentaires, montrent bien une progression dans la maîtrise de la confection de ces outils. Nos ancêtres préhistoriques étaient bien plus imaginatifs qu’on ne le pense, tout, entre leurs mains, devient outil ou arme: lames de découpe, pointes de lances.
Au néolithique, les objets deviennent plus lisses, plus polis. On voit apparaître des outils plus sophistiqués: aiguilles, harpons, etc. Les premières formes artistiques apparaissent, notamment de superbes gravures sur des os ou de l’ivoire. C’est aussi l’époque des premières poteries, et des sépultures, notamment des premiers menhirs.
Age du bronze
A partir de 2000 av. J.C., c’est l’âge du bronze. La maîtrise de cet alliage va considérablement modifier l’environnement humain, notamment au niveau de l’armement: casques, boucliers, et surtout épées. Mais le bronze intervient aussi dans d’autres domaines, notamment au niveau des ornements et des bijoux, dont certains ressemblent fortement à ce qu’on peut encore trouver sur certains marchés… L’or fait aussi son apparition dans les objets d’apparat.
Age du fer
Vers -800, la maîtrise du fer va conforter l’essor et la domination des peuples qui en acquièrent la maîtrise. Comme pour le bronze, le fer permet de fabriquer des armes plus résistantes, qui assurent une supériorité certaine à leurs possesseurs. Le fer et le bronze interviennent également dans la conception d’outils pour le labour ou le transport de marchandises (roues, socles de charrues, etc.).
Nos ancêtres les Gaulois
Les Gaulois ont excellé dans la maîtrise de ces outils. C’est ce qui a permis l’essor de leur civilisation vers -500. Le musée parle d’une invasion du nord de l’Italie et du sac de Rome par les Gaulois vers -390, une histoire dont je n’avais jamais entendu parlé, et dont parlerait Tite-Live: était-ce pour mieux justifier l’invasion de la Gaule par Rome quelques trois siècles plus tard?
L’opposition entre Rome et la Gaule fait évidemment l’objet de salles dédiées. On y trouve un tas d’informations intéressantes, notamment sur la bataille d’Alésia: la stratégie d’enfermement de Vercingétorix qui pensait prendre César par surprise, la remarquable organisation du camp romain, la bataille durant laquelle les Gaulois, pourtant en surnombre (ils se battaient à cinq contre un!), furent défaits par la combativité et l’avancée technologique des Romains, le massacre de plus de 400 000 hommes. La reconstitution d’une partie du camp romain est particulièrement surprenante. On y distingue même les ancêtres des mines antichar…
Les dernières salles sont dédiées à la Gaule mérovingienne et à l’archéologie comparée entre différentes civilisations. On y voit apparaître la maîtrise de nouveaux matériaux (notamment le verre), et de nouvelles techniques (les instruments de médecine et de dentisterie n’ont, apparemment, pas trop évolué depuis l’époque :).
La visite s’achève, comme pour chaque musée, par la boutique, dotée de nombreux livres sur l’archéologie, pour tous les âges et tous les goûts, du DVD Arte sur Rome au jeu de questions-réponses sur Astérix… J’y ai acquis un livre qui date un peu, La Bible arrachée aux sables, un pavé écrit par Werner Keller il y a plus de cinquante ans, qui a pris un coup de vieux depuis le livre de Finkelstein et Silberman. Compte-rendu à paraître sur ce blog très prochainement.
Conclusion
Un peu à l’écart, loin des foules parisiennes, ce musée vaut le détour, et plutôt deux fois qu’une. Doté d’un superbe jardin attenant, réalisé par Le Nôtre, avec une superbe vue sur Paris et l’Ile de France, il devrait être une destination obligatoire dès le retour des beaux jours.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec