Le foot, les juifs et Israel
Depuis une semaine, la planète football a pris de drôles de couleurs.
Palestine Saint-Germain ?
Tout a commencé par le match PSG-Atletico de Madrid, mercredi dernier. Un match qui n’avait rien à voir a priori avec les juifs ou Israel. Un match tranquille de Champion’s League, le genre de match qu’on peut voir les mardi ou mercredi soirs au stade, ou à la télévision, depuis des années. Depuis des dizaines d’années.
Et puis est apparu sur les écrans, sur nos écran, un tifo, un énorme tifo, comme on n’en avait encore jamais vu au Parc des Princes. Non pas sur nos écrans de télévision, trop prudes pour nous montrer la réalité des stades, mais sur les écrans de nos ordinateurs et de nos téléphones. Nos ordinateurs et nos téléphones à nous, les juifs. Un tifo qui circulait de compte WhatsApp en compte WhatsApp.
Que peut-on lire sur ce tifo ? Un immense Free Palestine, sous-titré : la guerre sur le terrain mais la paix dans le monde. Que peut-on voir sur ce tifo ? Un « combattant » palestinien en sang, et un I majuscule, remplacé par une carte d’Israel avec un motif de keffieh, signifiant par là-même, la vision de la Palestine portée par ces supporters est un remplacement pur et simple d’Israel.
From the river to the see, en couleurs et en 15x40m.
Un tifo anodin pour les supporters du PSG qui l’ont brandi pendant quelques minutes. Mais une horreur absolue pour les juifs de France, supporters ou non du PSG. Comment un tel message, revendiqué comme un message de paix, mais diffusant clairement un message de haine des juifs et d’Israel, a-t-il pu passer les barrières de sécurité à l’entré du Stade – avec fouille au corps, rappelons-le ? Comment les responsables du Parc des Princes ont-ils pu laisser ce tifo se dérouler, puis s’afficher pendant cinq ou six longues minutes, comme en ont témoigné quelques amis présents sur les lieux, alors que le moindre débile mental qui court à poil sur le stade se fait rattraper par la patrouille en moins de trente secondes ?
Une seule réponse possible : l’affichage de ce tifo a reçu l’assentiment des responsables du stade et des propriétaires du club. À savoir QSI, en abrégé : le Qatar. Qui rappelons-le est un partenaire du Hamas et des Frères musulmans depuis longtemps.
Pour mes amis juifs supporters du PSG depuis cinquante ans, qui ont soutenu le club dans toutes ses aventures, des plus compliquées au plus glorieuses, ce fut un choc, pire, une trahison. Le sentiment d’avoir été abandonné, réduit à néant. Vous aimiez votre club ? Dites-vous que votre club ne vous aime pas, ne vous aime plus. Vous aviez vibré avec Raï, Ronaldinho, Mbappé ou Zlatan ? Oubliez tout ça, c’est du passé.
Le présent, c’est ce tifo, c’est Free Palestine, c’est From the river to the sea. C’est une humiliation, une marque de mépris. Mes lecteurs qui ne sont fans d’aucun club de football ne comprendront peut-être pas ce sentiment, ce goût amer. Mais c’est pourtant ce qui s’est passé.
On aurait pu croire que le PSG aurait été sanctionné pour cette banderole géante. Par l’UEFA ou la FFF. Après tout, les délires racistes des supporters, quel que soit le club où ils se produisent, sont désormais sanctionnés. Mais là, il n’y a pratiquement rien eu. Juste … une interdiction de tifo jusqu’à la fin de la saison. Ça laisse rêveur, non ?
On aurait pu croire que le désespoir des juifs fans de foot s’arrêterait là.
Mais ce ne fut pas le cas.
Loin de là.
L’antisémitisme de retour à Amsterdam
Deux jours plus tard, un match de football opposant l’Ajax d’Amsterdam et le Maccabi Tel-Aviv se soldait sur le score de 5-0 pour l’Ajax d’Amsterdam. L’Ajax, le grand Ajax, l’ancien club de Johann Cruyff, ce n’est pas n’importe quel club de banlieue, incapable de gagner une coupe des champions malgré un défilé de stars et un budget de plus d;un demi-milliard d’euros. Non, l’Ajax, c’est autre chose. L’Ajax, c’est un des rares clubs, avec Tottenham en Angleterre, dont les supporters soient qualifiés, pour je ne sais quelle raison, de juifs. Un club où il arrive parfois que des drapeaux israéliens soient déployés dans les tribunes. Bref, un déplacement a priori sans douleur pour un club israélien. Contrairement à la prestation de la chanteuse israélienne lors de l’Eurovision.
Pourtant, les choses ont mal tourné.
Très mal tourné.
Pas avant le match, pas pendant le match, mais après. Au sortir du stade, les supporters du Maccabi Tel-Aviv ont été traqués par des hordes de voyous souhaitant s’en prendre à des israéliens, et casser du juif. Et cela n’avait rien de la bagarre classique entre bandes organisées ou hooligans, mais bien un lynchage organisé, avec des chauffeurs Uber impliqués dans le rabattage de touristes israéliens, et des séquences vidéos filmées par les assaillants, et diffusées sur les réseaux.
Ces images sont terribles, et montrent la violence de cette ratonnade qui, par miracle, n’a pas connu d’issue fatale. Mais on est passé de peu à côté d’un drame terrible.
Bien entendu, on a vu l’orchestre des pleureuses de LFI entamer la symphonie classique. « Ces émeutes, ce sont des bagarres de hooligans, rien d’original », ou encore « c’est la faute des supporters israéliens, ils ont arraché des drapeaux palestiniens dans la rue, ils s’attendaient à quoi ». So what ? Les bagarres de supporters dégénèrent-elles toutes en chasse à l’homme ?
On a vu, en quelques heures, un antisémitisme assumé, basé sur la culpabilité israélienne – ou juive, ne cherchez pas plus loin – comme raison de tous les malheurs du monde. Diffusé par les bonnes âmes de LFI et de certains de leurs amis de gauche, la merde dégoulinant encore de leurs yeux attendris.
Allait-on s’arrêter là ?
Certainement pas.
France-Israel, match à risque ?
Dans quelques jours aura lieu un match qualifié de match à haut risque. Un match opposant l’équipe de France à l’équipe d’Israel, match retour d’un match aller qui s’est achevé sur une victoire des tricolores, il y a quelques jours, 2 à 1. Un match qui fut joué sur terrain neutre, Israel étant en guerre.
Pourquoi ce match est-il un match à haut risque ? Après tout, il s’agit juste de deux équipes de football qui s’opposent, rien de plus. Oui mais qui arrive après le tifo du Parc. Et les émeutes d’Amsterdam. Deux illustration de ce que pensent des milliers de supporters de football dans le monde. La haine des homosexuels ou des joueurs de couleur, c’était de la gnognote. Avec la haine du juif, on peut s’en donner à coeur joie, et devinez quoi, il y aura des gens pour absoudre les auteurs des exactions, des sympathisants LFI ou des intellectuels de gauche, qui sauront remettre la faute sur Israel.
Israel a d’ailleurs demandé à ses ressortissants de ne pas se déplacer pour assister au match, qui se déroulera à Saint-Denis, ce petit coin de paradis de la banlieue parisienne …
Israel, nations des juifs ou juif des nations ?
Savez-vous pourquoi Israel participe à l’Eurovision et voit ses clubs de sport évoluer dans les compétitions européennes ? Tout simplement parce que ses voisins lui sont hostiles et ne désirent pas que leurs propres sportifs s’opposent à des sportifs israéliens.
L’hostilité des supporters parisiens ou « hollandais », la qualification à haut risque de tout événement sportif impliquant une équipe israélienne, la recommandation faite aux supporters israéliens de ne plus se déplacer en Europe, tout cela marque le début d’une nouvelle ère. Un ère qui pue. Une ère qui aboutira, au fil du temps, à ce qu’Israel ne puisse plus non plus participer aux compétitions européennes.
Les partisans du boycott auront alors gagné.
Et les démocrates de gauche, dans leur aveuglement, se seront une fois de plus ridiculisés.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec