L'astreinte
Les mots sont comme les êtres humains: certains nous déplaisent, d’autres nous séduisent, aucun ne nous laisse vraiment indifférents. Parmi les mots avec lesquels j’ai une affinité particulièrement forte, il y a un terme étrange, qu’on ne s’attendrait pas à trouver ici: astreinte. Ce terme, apparu au moyen-âge, dérive du verbe latin astringere, qui signifie « lier, attacher avec des cordes ». N’allez pas croire que je sois un fan des tortures indiennes: non, l’astreinte est pour moi corollaire à tout effort, et la base e tout progrès, de tout enseignement.
Le sens du mot astreinte, et sa forme conjuguée astreindre, a bien sûr évolué au fil des siècles. S’astreindre, s’obliger, s’engager, s’efforcer dans la durée. C’est la forme suprême de soumission volontaire, réfléchie, sans souci de rétribution immédiate. A opposer à la contrainte, imposée, à laquelle on se soumet le plus souvent de mauvais gré. Il y a, au contraire, quelque chose de noble dans l’astreinte.
C’est l’astreinte de l’étudiant, qui pour préparer ses examens, s’impose un programme draconien de révisions, et accepte de mettre une croix sur ses loisirs. C’est l’astreinte du sportif qui, régulièrement, répète les mêmes exercices, les mêmes mouvements, à l’entraînement, dans le froid ou sous la pluie. C’est l’astreinte de ce fidèle, qui chaque matin se lève à la même heure, pour procéder aux prières quotidiennes.
L’astreinte a également pris une connotation plus négative dans les métiers de service: c’est aujourd’hui ce qu’on appelait autrefois une « permanence », la capacité à servir des clients, des entreprises, à des heures où la majorité des gens font autre choses: le weekend, la nuit, durant les congés.
Nous avons tous nos propres astreintes. Réfléchissez, et devinez quelles sont les vôtres.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec