La renonciation de Joe Biden

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?

J’ai beaucoup de respect pour les individus qui préfèrent laisser leur place plutôt que de passer une année de plus à faire quelque chose qu’ils n’arrivent plus à faire pleinement, ou qui a fini par les lasser. Et un mépris sans limite pour ceux qui s’accrochent à leurs postes plus que nécessaire, privant les états et les organisations qu’ils dirigent d’un apport de sang neuf parfois indispensable pour traverser intelligemment les crises… De Benoit XVI à François Hollande en passant par Bill Gates, ces individus capables de lâcher les rennes du pouvoir montrent qu’on peut, parfois, à force de volonté, échapper au principe de Peter. À moins qu’on ne prenne ce genre de décision justement parce qu’on a atteint le niveau ultime, celui où on n’est plus utile ?

Joe Biden vient donc de rejoindre ce cercle très fermé. Bien sûr, les raisons d’un tel choix sont toujours personnelles. Bill Gates a laissé les clefs du camion Microsoft pour passer à autre chose (il devait en avoir marre des écrans bleus, ou bien envisageait-il de s’acheter un MacBook). Benoit XVI a passé la patate chaude à son successeur, qui depuis une dizaine d’années voit exploser autour de lui de multiples scandales sur les moeurs de ses ouailles. François Hollande a décidé de ne pas se représenter en 2017 simplement … parce qu’il savait qu’il n’avait aucune chance de faire illusion une deuxième fois.

Quant à Joe Biden, les pressions amicales de son entourage et de différents soutiens du parti démocrate ont eu raison de ses velléités. On a vu fleurir depuis quelques semaines une prodigieuse campagne de dénigrement, insistant lourdement sur ses trous de mémoire à répétition ou ses pertes d’équilibre. On aurait pu croire que ces méchantes insinuations sur celui qui dirige la première puissance mondiale étaient le fait des partisans de Donald Trump, mais en y réfléchissant à deux fois, on peut imaginer que Trump aurait sans doute préféré se retrouver pour un second face à face avec le président sortant.

Mais ce n’est pas si sûr. La vice-présidente, donnée pour futur candidat du parti démocrate, a brillé par son absence ces quatre dernières années, comme si le mandat de Biden avait fini par limé les ambitions de sa rivale. Ira-t-elle au combat face à Trump ou laissera-t-elle la place à un candidat sorti du chapeau ? J’ai peine à croire à une nouvelle candidature Bernie Sanders. Et les autres postulants, Michele Obama comprise, ont peut-être plus envie de passer leur tour que de mener une demi-campagne perdue d’avance… J’ai aussi entendu dire que le parti démocrate manquait de candidats d’envergure nationale du fait que dans la génération des 40-50 ans en mesure de se présenter, nombreux sont ceux qui trainent quelques dossiers compromettants, allant de la tendance à la fumette durant les années d’étude, à quelques affaires à connotation sexuelle. Mieux vaut tenir un poste de deuxième catégorie sans exposition nationale que de tout cramer en essayant de viser trop haut ?

Bref, la victoire d’un Trump encore auréolé de son statut de miraculé se fait de plus en plus certaine.

Joe Biden aura-t-il été un grand président ? Tout dépend à qui on le compare. Les États-Unis semblent, d’un point de vue économique, avoir retrouvé une forme étonnante, reléguant la vieille Europe loin derrière en termes d’évolution du pouvoir d’achat de ses citoyens. Il a assuré le coup sur les grosses crises internationales, soutenant l’Ukraine sans trop en faire, et assurant Israel de toute son aide et de toute son empathie durant les derniers mois, malgré son agacement bien compréhensible face à Bibi.

Christophe Faurie analyse lui aussi le départ de Joe Biden. Il considère que la victoire électorale tient à une minorité d’électeurs, celle des indécis. Peut-être que dans le cas présent, c’est au contraire le poids de ceux qui sont bien décidés qui va sceller le destin de Donald Trump.

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?