Islam et science
Les rapports entre science et religion sont souvent difficiles, et ce, quelle que soit la religion considérée. En se lançant dans cet essai de 200 pages sur les rapports en Islam et sciences, Alexandre Moatti savait qu’il s’aventurait en terrain difficile. Son livre traite cependant de ce sujet avec le sérieux et la rigueur auxquels il nous a déjà habitués dans ses précédents ouvrages.
C’est que les rapports entre la science et Islam sont bien plus complexes qu’on ne pourrait l’imaginer. Il faut se rappeler, en effet, que nombre d’avancées scientifique, en algèbre ou en astronomie, ont été faites ou diffusées auprès de l’occident chrétien à une époque qu’on qualifie aisément d’âge d’or de l’Islam. Avec le temps, pourtant, l’écart s’est creusé. Entre les adeptes d’un certain concordisme, ceux qui font passer les sciences religieuses avant la science elle-même, les courants qui se posent en réaction à la modernité sont plus variés qu’on ne l’imagine.
C’est un livre difficile, une recherche approfondie, basée sur l’étude des textes et des auteurs, que livre ici Alexandre Moatti. On y croise des auteurs aussi divers que Tariq Ramadan, René Guénon, Ziauddin Sardar ou Harun Yahia. Des noms qui ne vous parleront peut-être pas, mais qui sont les marqueurs d’un rapport de plus en plus équivoque à la science. Moatti rappelle d’ailleurs l’importance de ce rapport à la science, car il engage un rapport à la rationalité et la méthode scientifiques, qui permet d’exercer son discernement.
Tout au long de la lecture de ce livre, je me suis demandé s’il n’en était pas de même pour les autres religions, et notamment le judaïsme, au sein duquel une fraction non négligeable tend à un rapport à la science tout aussi douteux. Les thèses concordistes existent aussi au sein du monde juif, même si elles n’ont pas les mêmes répercussions politiques ou sociétales. L’accroissement de la pratique religieuse depuis une quinzaine d’années au sein de toutes les communautés, tout en bénéficiant du progrès technologique, va à l’encontre d’un rapport serein à la science. Il est donc urgent de prendre conscience du phénomène. Ce livre y contribue.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Intéressant billet, je vais aller voir ce livre. Dans la pratique il y a beaucoup de musulman(e)s dans des labos, y compris des étudiantes et des prof voilées, et je n’ai jamais vu que ça pose un problème. J’ai dirigé la thèse d’embryologie d’une étudiante voilée : la biologie l’évolution etc. ne semblaient lui poser aucun problème.
Je suis convaincu que le vrai chercheur, le scientifique, va au-delà de ces débats. Ce type de problème intéresse souvent plus des personnes dont la culture scientifique reste superficielle, et qui se parent d’un vernis pour expliquer une concordance qui tient mal la route