Henry Kissinger
Conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, puis secrétaire d’état sour Nixon puis Gerald Ford, Henry Kissinger incarnait à lui tout seul combien l’identité juive peut coller à la peau d’un personnage politique, combien même il ne se revendique pas particulièrement de cette identité. Avec son physique de Léon Zitrone américain, Henry Kissinger a marqué son époque.
Deux adeptes du noeud papillon, saurez vous reconnaître lequel présentait le tiercé ?
Un juif allemand à la maison blanche
Né Heinz Alfred Kissinger dans l’Allemagne de Weimar, il émigra avec sa famille aux États-Unis peu de temps avant le déclenchement de la seconde guerre mondiale. Ayant acquis la nationalité américaine pendant le conflit, il mit sa connaissance de la culture allemande au service de l’armée américaine, servant au sein des unités de renseignement.
De retour en Amérique, il suivit des études de science politique à Harvard, et entama une carrière universitaire avant de rejoindre la vie politique, comme conseiller politique au sein du parti Républicain. Après l’élection de Richard Nixon, son rôle devient de plus en plus important au sein de l’administration, et c’est sous son impulsion que sont signés les accords de Paris, qui lui vaudront le prix Nobel de la paix 1973.
Partisan de la détente avec les adversaires communistes – on est alors encore en pleine guerre froide – on lui doit la négociation des accords SALT, et le timide rapprochement avec la Chine de Mao. Mais il laissa exprimer son anti-communisme dans la politique étrangère américaine vis a vis des pays d’Amérique du Sud.
Kissinger et la question juive
Concernant le proche-orient, enfin, Kissinger ne laisse pas le souvenir d’une tendresse excessive vis a vis de l’état d’Israel, encore tout jeune et déjà exposé à sa quatrième guerre, en octobre 1973. Kissinger fit preuve d’un franc soutien durant la guerre de Kippour, assurant Israel de disposer de l’aide militaire américaine pour tenir fasse à l’agression de l’Egypte et de la Syrie.
Mais ile ne faut prendre Kissinger pour plus pro-israélien que cela. Il était favorable à un retrait au plus vite d’Israel des territoires acquis durant la guerre des six jours, et en cela, s’est opposé avec ses interlocuteurs israéliens jusqu’à la fin de son mandat. Ses relations avec Golda Meir étaient plutôt tendues, et il s’opposait, au grand dépit de la célèbre premier ministre israélienne, à toute ingérence américaine dans le problème des refuznik, ces juifs russes qui voulaient quitter le régime soviétique.
Renaud Girard, en 2007, rappelait dans un article du Figaro deux anecdotes amusantes au sujet des relations de Golda Meir et de Henry Kissinger. Dans la première, Nixon s’étonne que les Etats-Unis et Israel possédaient à cette époque deux ministres des affaires étrangères soient juifs, Henry Kissinger d’un côté, et Abba Eban de l’autre. Oui, aurait répondu Golda Meir, mais le mien parle anglais sans accent… Il est vrai que Kissinger ne s’était jamais débarrassé de son accent allemand si prégnant.
L’autre, est encore plus fine, et je me souviens l’avoir entendue de plusieurs sources différentes. Golda Meir s’étonnait de l’attitude de Kissinger vers la fin de la guerre de Kippour : comment un juif peut-il demander aux israéliens de ravitailler l’armée égyptienne encerclée dans le désert du Sinaï, au lieu d’en faire des prisonniers. Kissinger aurait répondu qu’il était d’abord citoyen du monde, puis citoyen américain, puis républicain, et enfin juif. Ce n’est pas grave, lui aurait alors rétorqué Golda Meir, chez les juifs, on lit de droite à gauche…
Découvrez d'autres articles sur ce thème...
Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec