Hatufim – prisonniers de guerre
Si vous êtes un habitué des séries diffusées sur Arte le jeudi soir, peut-être avez-vous découvert l’excellent Hatufim (prisonniers de guerre), série israélienne diffusée en 2010 en Israël, et qui connaît un beau succès international: elle aurait même inspiré Homeland.
Hatufim, c’est l’histoire du retour de deux soldats israéliens, capturés en compagnie d’un troisième dix-sept ans auparavant, lors d’une opération de renseignement en plein Liban. Nimrod Klein et Uri Zach rentrent, avec le corps de leur compagnon, Amiel Ben-Horin. Durant les 10 épisodes de la première saison (la seconde vient d’être diffusée en Israël), nous assistons à la pénible réintégration de ces deux soldats, qui ont passé 17 ans dans les geôles du Hezbollah: la réintégration dans leur famille, tout autant qu’au coeur de la société israélienne, et de l’appareil militaire. Beaucoup de choses ont changé entre 1991 et 2008, et les prisonniers libérés vont devoir réapprendre à vivre.
Hatufim porte un point de vue subjectif à tout moment. Il n’y a pas de bons ou de méchants (à l’exception du Hezbollah, bien sûr). Nous adoptons tout à tour le point de vue de chacun des personnages, des prisonniers de retour en proie aux cauchemars, aux doutes, au désespoir, à celui de leurs compagnes – et en particulier de celle qui a trahi son fiancé en épousant son frère – ou à celui de l’officier-psychiatre en charge de l’évaluation du possible « retournement » des deux soldats pendant leur captivité. Car la question se pose, de savoir jusqu’où ces deux soldats ont été torturés, manipulés, quelles informations ils ont transmis, et s’ils constituent ou non une menace pour leurs proches.
Les deux soldats de la série n’ont pas été libéré suite à une rançon, bien entendu, mais dans le cadre d’un échange: Israël a de nombreuses fois été confronté au problème du retour de prisonniers, à chaque fois en échange de centaines de terroristes libérés de prison. A chaque fois se pose la question du prix à payer, de la remise en liberté d’individus ayant souvent participé à des attentats meurtriers sur le sol israélien. Le débat n’est pas abordé pour l’instant, sauf par allusion à certains moments. On pense, bien entendu, à des cas réels d’échanges de prisonniers, le plus récent étant celui de Gilad Shalit. A ma connaissance, il n’y a jamais eu d’échange pour des prisonniers ayant passé plus de cinq ans, les échanges se font en général dans l’année ou les deux ans qui suivent. Certains soldats sont portés disparus, notamment le pilote Ron Arad, disparu en 1986 et qui passa près de dix ans en captivité entre Liban et Iran, avant de probablement décéder.
La force de Hatufim, c’est bien sûr ce regard porté sur les familles de prisonniers: l’ancienne petite amie qui craque au bout de quatre ans pour épouser le frère de son ex, l’épouse dévouée qui mène le combat dix-sept années durant, la soeur qui persiste à croire son frère encore en vie (et la saison 2 lui donnera raison…), l’adolescent qui n’a jamais connu son père, etc. De scène en scène, Hatufim ne nous épargne pas, hélas, les scènes de torture à répétition, aussi bien physique que morale.
Bref, si vous ne l’avez pas encore fait, branchez-vous sur Hatufim, le jeudi soir sur Arte. Il reste encore 3 soirées (6 épisodes), et vous ne serez pas déçus par ce que vous allez voir.
PS: pour mes amis hébraïsants, il est possible de suivre les épisodes en hébreu en changeant la langue dans le men TNT.de votre décodeur u de votre box ou
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec