Google n'est pas le diable!
Alors que, trois ans et quelques après le refus du précédent directeur de la BNF, Google est en passe de trouver un accord avec l’actuelle direction, une vigoureuse campagne de protestation contre la firme de Mountain View est orchestrée un peu partout dans la presse nationale. LeMonde daté de samedi comporte un dossier sur ce sujet, dossier dont un article, signé Emmanuel Hoog, m’a poussé à réagir.
L’auteur y compare le marché que Google passe avec les principaux fonds documentaires a un marché de dupe, une sorte de pacte avec le diable, par lequel les bibliothèques et autres instituts, sombrant dans l’univers tendrement niais des bisounours, laisseraient le méchant Google faire main basse sur ces prodigieux fonds documentaires, et s’enrichir, grassement, forcément, à coup de publicité en ligne.
Je ne partage pas l’avis de Mr Hoog. Les fonds en question recèlent de richesses inaccessibles au commun des ortel certes, mais de richesses qui ne sauraient trouver un large public par le simple fait de leur publication en ligne par une entreprise, serait-elle Google. Et si Google, maîtrisant une technologie de numérisation coûteuse, se propose de numériser les fonds en question, il faut bien comprendre que cela ne peut être fait que dans le cadre d’une transaction, donc dans l’intérêt partagé des propriétaires de ces contenus, et de celui de Google.
Pour ma part, je vois plusieurs avantages à l’initiative lancée par Google:
- Google dispose d’une réelle avancée technologique: numériser des ouvrages sans dégrader leur état requiert bien plus qu’un scanner haute résolution. Et du côté des fonds, il est évident que la nuémrisation des contenus est un enjeu majeur, tant du point de vue de la conservation, que de l’espace de stockage physiquement nécessaire.
- Google dispose d’une technologie de recherche tout à fait au point, et des capacités de stockage associées. Une technologie dont elle est prête à assumer, seule, tous les coûts. Les autres prestataires sont-ils prêts à assumer ces coûts? En sont-ils même capables?
- Le quasi-monopole que risque d’obtenir Google n’est pas, en réalité, un problème: imagineriez-vous viable une solution d’annuaire en plusieurs morceaux, comme par exemple un annuaire où le nord de la France serait accessible sur Pages Jaunes, et le Sud sur Pages Vertes? Non, bien évidemment. Quitte à procéder à des recherches sur tel ou tel fond, l’unicité du moteur me semble être un avantage, quand bien même la concentration des savoirs auprès d’un seul acteur peut présenter certains risques.
Il me semble que les tergiversations actuelles et les campagnes de dénigrement de Google relèvent d’un manque de vision à long terme. Et qu’à trop vouloir retarder l’échéance, les conditions d’un accord seront de moins en moins favorables. Au détriment de qui à votre avis?…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Je m’interroge: qu’est-ce que les fonds ont à perdre dans cette affaire? Leur but n’est-il pas la diffusion de leur contenu ?
Si l’affaire est aussi juteuse pourquoi n’y a-t-il pas d’autres candidats? Pourquoi pas le Monde, d’ailleurs, dont les finances ne sont pas flamboyantes?
Est-il aussi évident que cela que l’affaire est rentable: jusque-là la pub en ligne n’a pas enrichi grand monde (en dehors du moteur Google), et j’imagine que numériser un grand nombre de livres doit être extrêmement coûteux?
Par contre, n’est-ce pas une concurrence redoutable pour beaucoup de producteurs / diffuseurs de livres ?
Je doute que les ouvrages numérisés trouvent des éditeurs, voire des lecteur… Cela relève plus à mon avis du domaine de la recherche. Entre une version de poche d’un Pantagruel et un original tu préfères lire quoi?
Je ne comprends comment Google, ou même tout autre organisme, pourrait obtenir le monopole sur l’exploitation des oeuvres numérisées. En effet, qu’est-ce qui empêche tout autre organisme, ou entreprise, une fois que Google a déjà numérisé les fonds, de re-numériser les mêmes ouvrages (pour peu, évidemment, que le procédé employé ne soit pas destructif, lui aussi)?
Ainsi, si Microsoft (avec Yahoo! et Amazon: http://www.itespresso.fr/microsoft-yahoo-et-amazon-unis-pour-contrer-google-books-30981.html) tient absolument à aussi numériser les fonds de la BNF, pour les rendre accessibles à son moteur de recherche bing, qu’est-ce qui l’en empêche?
Google aurait-il fait signé à la BNF une clause de « non re-numérisation »?!? Clause qui serait un secret commercial, comme les fameuses licences OEM de Microsoft?
Il me semble donc qu’il est plus facile à l’ancien directeur de la BNF (et quelques responsables de notre pays) d’attirer l’attention sur un grand méchant loup, plutôt que montrer le chemin sur ce genre d’initiatives.
Par exemple, pourquoi ne pas numériser certains contenus (notamment les peintures libres de droit) de nos musées (un peu à l’image de l’initiative du WebLouvre à la fin des années 1990, avec comme acteur principal un de nos camarades, ou comme l’a fait dernièrement l’INA)?
[Aussi: pourquoi ne pas numériser les actes d’état civils antérieurs à, disons, 2000?]