Et votre vaccin, vous le voulez en quelle taille ?
Un des aspects les plus étonnants de la période que nous traversons, c’est la coexistence, voire la compétition, entre les différents vaccins sortis ces derniers mois. Au-delà de l’aspect purement financier de l’affaire, le choix du vaccin par les différents pays et les populations qui y habitent relève, de plus en plus, de l’univers de la mode ou du sport, que de celui de la santé. Chacun y va de son petit favori.
Il y a d’abord le Pfizer/BioNTech. Celui-là, c’est probablement celui qui remporte le plus de succès. Sorti le premier, validé en Europe fin décembre 2020, il affiche un excellent taux d’efficacité, et notamment chez les populations les plus âgées. C’est celui adopté par Israel pour sa fulgurante campagne de vaccination. Il n’est cependant pas exempt de défauts. IIl doit être conservé à très basse température, il faut en injecter deux doses pour obtenir la meilleure efficacité. Et il se fait rare. Sans parler du fait qu’il utilise une technologie récente, l’ARN messager. Et qui dit récent dit … dangereux aux yeux du commun des mortels…
Vient ensuite celui conçu par Moderna, orti en janvier 2021. Il suit le même principe (ARN messager) que celui de Pfizer/BioNTech, mais en plus, il se conserve à une température moins basse, et donc plus facilement.
Il y a également quelques challenger, comme Spoutnik V, le vaccin russe, autorisé en Europe depuis quelques jours. S’il faisait sourire les contempteurs de Vladimir Poutine il y a quelques mois, son efficacité avérée semble avoir rassuré en haut lieu. De là à faire confiance aux lots distribués en Europe, il y a un pas que certains n’oseront probablement pas franchir.
Le plus attendu est sans doute celui de Johnson&Johnson, distribué par le laboratoire Janssen (vous êtes priés de ne pas confondre les deux, qui ne sont pas cousins). Sa principale qualité, c’est que comme pour Paic Citron, une seule dose suffit ! Pas besoin de retourner se faire piquer cinq ou six semaines après la première injection, d’autant plus que cette seconde piqûre est, paraît-il, celle qui fait le plus déguster…
N’oublions pas non plus les grands absents, comme Sanofi-pasteur, qui a jeté l’éponge, quelques jours à peine avant d’annoncer une réduction de ses équipes de recherche. Allez savoir pourquoi il a fallu que des petits malins mal intentionnés fassent le lien entre ces deux informations. Un vrai manque de délicatesse.
Et puis il y a celui d’AstraZeneca. Massivement utilisé au Royaume-Uni, il a mauvaise presse, car la rumeur lui attribue une efficacité moindre que celle de ses deux concurrents. Pire, le Danemark a mis en pause la campagne de vaccination à base de ce dernier, car on le soupçonne d’être à l’origine de certains décès. Soupçon à relativiser, bien évidemment, quand on voit que des millions de personnes ont été vaccinées sans problèmes. Oui mais voilà : une fois une rumeur lancée, c’est difficile de la rattraper. J’en vois déjà qui hésitaient à se faire vacciner, et qui maintenant préfèreraient attendre que des doses de Pfizer soient disponibles plutôt que de se faire injecter du AstraZeneca…
Une telle diversité de vaccins, de technologies, de mode opératoire, ne simplifie pas les choses. Imaginez quel enfer ce serait s’il fallait choisir entre quatre ou cinq marques d’aspirine aux modes opératoires différents, et dont l’efficacité dépendrait de l’âge du capitaine !
Sans parler des répercussions du choix des vaccins sur le quotidien des patients après traitement. Quid, par exemple, d’un passeport vaccinal, qui favoriserait celles ou ceux vaccinés avec le vaccin A, mais limiterait les déplacements de ceux vaccinés avec le vaccin B ? Ne rigolez-pas, j’en vois déjà qui s’imaginent que les pays vaccinés avec du Pfizer vont laisser entrer à bras ouverts les touristes vaccinés avec du AstraZeneca.
Ce sacré Covid est décidément un extraordinaire empêcheur de tourner en rond. Après avoir essoré nos économies, avoir fourni une solution non optimale au problème des retraites, avoir détruit le tourisme, la restauration et l’événementiel, avoir freiné la mondialisation et amélioré le climat, avoir mis en évidence la dépendance de l’ancien monde aux capacités de production du nouveau, avoir montré qu’en matière de santé, l’investissement dans la recherche s’avère toujours payant, avoir, enfin, montré que l’Europe, en matière d’organisation, ce n’était pas tout à fait au point, voici que ce satané virus est en train de mettre à mal les relations internationales.
Au fait, et vous, cher lecteur, vous avez choisi lequel ?
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec