Emilia Perez

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?

En cette période d’introspection qui précède les fêtes de Tichri, s’il y a un film à aller voir, c’est bien Emilia Perez. Et pourtant, le tapage médiatique autour de sa projection à Cannes ne me donnait pas vraiment envie d’aller voir cette histoire un peu sordide, d’un patron de cartel mexicain qui décide de devenir une femme. Mais je me suis laissé convaincre par les commentaires d’amis, et a posteriori, je crois avoir fait le bon choix.

Car le thème principal n’est pas, contrairement à ce que font croire les médias, l’identité de genre et la transition sexuelle, mais plutôt la repentance, un sujet capital à l’approche de Yom Kippour. La rédemption est-elle préalable à tout changement, physique ou psychologique, ou ne peut-elle avoir lieu qu’après qu’un tel changement a été opéré ? C’est le problème de l’oeuf et de la poule, revisité à la sauce Audiard…

Manitas del Monte est donc le chef d’un cartel mexicain, qui vit de plus en plus difficilement son identité sexuelle. Né dans les quartiers miséreux de Mexico et destiné, par sa naissance, à un destin de voyou minable, c’est pour cacher sa féminité refoulée qu’il a gravi les échelons qui l’ont mené à cette position de chef de cartel, s’imposant par une violence décuplée. Mais il n’en peut plus, et charge une jeune avocate, spécialisé dans la défense de criminels, de lui trouver le médecin qui lui assurera, dans l’anonymat absolu, le changement d’identité qu’il souhaite ardemment.

Vous croyez que je vous ai spoilé ? Absolument pas, le paragraphe précédent couvre à peu près les dix premières minutes du film. Le reste, c’est à dire près de deux heures de cinéma de très grande qualité, raconte comment sous sa nouvelle identité, Emilia Perez alias Manitas del Monte va se mettre au service d’une cause : retrouver les milliers de personnes disparues, victimes collatérales de la violence quotidienne, entre cartels et forces de l’ordre.

Seulement les choses ne sont pas si simples, et là où un réalisateur américain aurait probablement conclu le film par la résurgence de la bête, Jacques Audiard propose un récit fait de douleur et de questionnements. Admirable parcours d’une personne qui découvre sa véritable identité, et répare les fauets de son autre lui-même – ou elle-même.

Le tikoun olam, la réparation du monde, voilà le sujet principal de ce film, deux fois primé à Cannes (prix spécial du Jury, et prix d’interprétation féminine pour l’ensemble des actrices). C’est tellement évident que je suis sorti de la salle en me demandant si Audiard aurait pu donner ce titre..

Comment pourrait-on passer qui s’appellerait Tikoun Olam ?

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?