Elections, piège à cons

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La démocratie est le pire des systèmes, on n’a pas trouvé mieux, disait Winston Churchill. Il avait certainement raison, mais parfois, il faut se pincer très fort pour s’en convaincre. Et la situation politique en France depuis le début de la semaine nous en donne, une fois encore, une parfaite illustration.

L’Europe vous remercie bien…

Elles avaient l’air pourtant anodines, ces élections européennes. Une consultation classique des électeurs de plusieurs pays, pour renouveler le Parlement européen, ce bidule dont personne ne comprend le fonctionnement réel et qu’à peu près tout citoyen confond avec la Commission européenne. Bref, aucune incidence, aurait-on ou penser, sur le régime des retraites, le budget de l’état, la réforme du bac ou les chantiers des J.O. Mais les partis d’opposition ne l’entendaient pas de cette oreille, et transformèrent le scrutin en référendum pro ou anti Macron. Et il advint ce qui devait advenir. La Macronie s’est mangé une gamelle, et le RN s’est érigé en parti victorieux, en totalisant plus du double des voix obtenues par ses adversaires immédiats.

C’était bien la peine qu’Emmanuel Macron et Gabriel Attal se décarcassent, multipliant les interventions à la radio ou à la télévision au détriment de la tête de liste, Valérie Hayer, sacrifiée sur l’autel de la démocratie européenne. Il est d’ailleurs étonnant de constater à quel point les partis dits fréquentables ont tendance, lors des élections européennes, à placer des fusibles prêts à disparaître au lendemain d’une défaite, alors que la portée de la défaite est bien plus grande qu’ils ne le pensent.

Bref, au soir du 9 juin 2024, le vaisseau amiral de la Macronie était en train de sombrer.

Et c’est le moment que choisit son capitaine pour tout saborder, en annonçant une dissolution.

Poker menteur

Je ne sais pas si le président de la République est un bon joueur de poker. De l’avis des amis que j’ai consultés sur le sujet, la réponse est unanime : c’est un joueur qui croit avoir un bon niveau, mais qui se fait des illusions sur l’efficacité de son style de jeu. Bref, ce qui se voulait être un coup de génie risque bien de faire pschittt, comme dirait feu Jacques Chirac.

Pourtant, c’était bien parti dans les premières heures de la semaine. La gauche rentrait dans le mode opératoire qu’elle affectionne : la cacophonie générale. Tandis que la droite républicaine, tout juste rescapée d’une élection où elle venait de réunir 5% des suffrages cherchait une bulle d’oxygène et que l’extrême-droite, sortie en tête de ces élections européennes, se demandait si l’annonce présidentielle était un deep-fake des russes ou des chinois…

On put donc admirer le machiavélisme d’un Mélenchon, dont les sbires n’avaient obtenu que 10% des suffrages la veille, faire une OPA en bonne et due forme sur le parti socialiste arrivé devant lui avec 15%, au détriment d’un Raphael Glucksman désemparé. Tout en se délectant, en même temps – pour plaire à Macron – d’un rapprochement pas si inattendu entre Marine Le Pen et sa nièce, au détriment d’un Eric Zemmour cocufié en direct par sa blonde partenaire… Cerise sur le gâteau, la désintégration de LR semblait en bonne route, après l’annonce d’Eric Ciotti, effrayé à l’idée de perdre son poste face à un candidat du RN et prête à tous les échanges pour garder son statut.

Renaissance en mal de résurection..

Le spectacle était de grande qualité, et il est fort probable que du côté d’Emmanuel Macron, cela devait jubiler. Enfin, pas tant que cela quand même. Car s’il y a un parti qui semble faire les frais de cette annonce, c’est bien le parti présidentiel. Souffrant d’une absence de majorité depuis deux ans, il risque bien de devenir un petit parti d’opposition d’ici trois semaines.

Car les premières projections sont tombées, et elles ne semblent pas valider le bien fondé du coup de poker présidentiel. En réalité, les élections législatives du 30 juin et du 7 juillet ressemblent de plus en plus à une répétition générale avant la présidentielle de 2027 : une opposition frontale entre un bloc d’extrême gauche, porté par les hordes de Jean-Luc Mélenchon, une NUPEs rebaptisée Front Populaire – le détournement sémantique est un sport national chez ces gens-là… – et un autre bloc d’extrême droite, porté par la famille Le Pen, qui voit dans ces élections anticipées une bonne occasion de prendre le pouvoir, avant que ne se déroule le procès des faux assistants parlementaires du FN, assistants qui, souvenez-vous en, devaient travailler au sein du Parlement européen…

La boucle est bouclée.

Et dire qu’on pensait jusque là que la construction européenne était le meilleur moyen de maintenir la paix…

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