Comment peut-on apprécier le football ?
Une de mes charmantes lectrices m’a récemment demandé, suite à la série d’articles ayant trait à la phase finale de la Champion’s League, pourquoi j’appréciais le football. Si la question peut paraître incongrue aux yeux d’un fan du ballon rond, j’admets facilement qu’il n’en est pas de même pour ceux, et surtout celles, ne nous leurrons pas, qui restent insensibles à ce sport.
Voici donc quelques éléments de réponse.
Le souvenir de la jeunesse passée
La première raison est toute personnelle : le football est le sport collectif que j’ai le plus pratiqué tout au long de ma vie. Et pourtant, je n’étais pas un joueur très talentueux, du moins à mes débuts. Plus jeune que mes camarades de classe, donc souvent plus chétif, j’étais la plupart du temps relégué dans les cages, comme gardien de but, où à l’arrière du terrain, appelé paradoxalement à défendre parce que je n’avais pas les moyens d’être offensif, alors que je n’étais visiblement pas assez costaud pour être un bon défenseur. Je manquais de vigueur, de souffle, et myope assez tôt, j’avais une vision du jeu assez passable. Bref, rien qui put marquer les mémoires. Sauf la mienne.
Un premier changement s’opéra lorsque je choisis de pratiquer le football à l’X. À raison de 2 séances par semaine, un match et un entraînement, je ne pouvais que progresser, tout comme mes camarades de l’équipe 5, la plus mauvaise … des 5 équipes de l’école à cette époque. Par souci de discrétion, je tairai poliment le nom de mes coéquipiers, devenus pour certains d’influents manageurs dans de grandes entreprises. Mais on peut dire que nous n’étions pas les meilleurs joueurs au monde, plus habitués aux raclées qu’aux grandes victoires.
Nonobstant un 5-2 asséné à l’équipe 2 de l’ENSTA, un jeudi après-midi.
Je ne désespérais pas pour autant, et durant les quinze années que je passais chez Dassault Systèmes, je participais de manière assidue, aux matches que nous jouions d’abord sur le terrain de Bagatelle, puis sur celui de Dassault Aviation. Avec un deuxième match joué le dimanche entre amis, je ne pouvais là encore que progresser.
Le véritable changement intervint l’année où je me mis à pratiquer le Karaté. Cet art martial permet en effet de renforcer sa musculature, tout en gagnant en souplesse, en vivacité et en endurance. Bref, j’étais transfiguré : en quelques semaines, j’acquérais une plus grande résistance et une accélération appréciable. 1993-1994 fut sans aucun doute ma meilleure saison, jusqu’à ce qu’un claquage à la cuisse vienne tout compromettre. J’ai pourtant persévéré, et ai pratiqué le football jusqu’en 2006.
J’ai cessé de pratiquer le football vers quarante ans. À cette époque, j’enchaînais les blessures : entorses, contusions. Le plaisir de ce sport d’équipe avait disparu, pour laisser place aux ennuis et tracas que l’on connaît avec l’âge. Je n’ai rejoué, depuis, qu’à l’occasion d’un championnat d’Urban foot avec l’équipe de l’agence, championnat où nous finîmes à la 6e place sur 8 équipes.
Le creuset d’une mémoire collective
La seconde raison, c’est l’engouement que procure ce sport collectif lorsqu’on le regarde à la télévision. Le football est comme une religion, avec ses prêtres, ses messes, ses fastes et ses rendez-vous annuels. Je garde, comme des millions d’autres personnes, le souvenir de ces soirées passées devant le poste de télévision, en noir et blanc ou en couleur, à regarder les équipes du passé en découdre. Je e souviens même avoir passé quelques soirées à écouter la retransmission de matches à la radio…
Qu’il s’agisse de compétition nationale, européenne ou mondiale, le plaisir est le même. La dimension collective l’emporte sur la rationalité d’une heure et demie passée à regarder vingt-deux primates courir après un ballon. Tout y est : le suspense, le chagrin, la joie, la déception, la colère, le dégout, l’ennui parfois. Paradoxalement, c’est avec la surabondance de matches que notre époque permet, grâce à internet et aux enjeux financiers colossaux qui sont associés à certaines rencontres, qu’une lassitude peut apparaître.
Mais rien n’altèrera le souvenir de certaines soirées, comme le match de Séville en 1982, ou les deux coupes du monde remportées par l’équipe de France, tout comme la main de Maradona (et le second but qui suivit le premier litigieux) ou celle de Thierry Henri, les formidables dribbles de Lionel Messi ou les accélérations de Kylian Mbappe, la défaite des Pays-Bas en 1974, la talonnade de Rabah Madjer, les 5 buts de Lewandowski ou l’élimination du Brésil par l’Allemagne en 2014, ou la victoire in extremis de l’équipe de France face à l’Italie en 2000. Sans oublier le coup de boule de Zizou…
À chacun ses raisons
Voilà, j’ai livré les deux grandes raisons pour lesquelles je continue à apprécier le foot.
Malgré les défaites et les matches ratés.
Malgré les fautes et les actes d’anti-jeu.
Malgré les salaires mirobolants et les blessures imaginaires.
Mais je suis certain que d’autres passionnés par ce sport, auxquels on poserait la même question, livreraient une réponse toute différente.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Ok pour tout cela, moi aussi j’ai partagé beaucoup de ces émotions, en particulier avec les Verts, mais aujourd’hui les défenses sont devenues tellement fortes, tellement efficaces, y compris les actions défensives des attaquants, que la plupart des matchs sont devenus mortellement ennuyeux. Un miraculeux Messi ou Levandovski peut faire illusion, certains, voire beaucoup, se satisfont de ces rarissimes occurrences, pourquoi pas.