Amazon: de Ah! …. à Zut!
Connaissez-vous l’histoire d’Amazon et de son dirigeant-fondateur, le mythique Jeff Bezos? Si ce n’est pas le cas, précipitez-vous sur l’ouvrage sorti il y a un peu moins d’un an, The everything store, écrit de main de maître par le journaliste Brad Stone.
Amazon, c’est ce géant de l’e-commerce, que Bezos a imaginé, sur le modèle de Wal-Mart, comme un magasin où l’on trouverait à peu près tout ce qui se vend (de A à Z, comme l’indique son logo…). Bien sûr, cela prend du temps, et le livre retrace bien les grandes étapes: la vente de livres, puis de produits culturels, de jouets, d’appareils électroniques, de produits de luxe, de produits frais, de contenus dématérialisés, d’appareils pour lire ces contenus dématérialisés (Kindle, Fire TV). Les enjeux, les risques pris, notamment financiers, les défis à relever, les compagnons de route, tout cela, Brad Stone le retrace dans le détail, dans le plus pur style des grandes bios à l’américaine.
Mais Amazon, c’est aussi un défi permanent, celui d’un groupe de taille gigantesque, qui veut encore peser comme une startup. Ce livre le montre bien, en développant les « méthodes » Amazon, notamment le dimensionnement des équipes projet, le risque permanent de voire d’autres acteurs de l’e-commerce les challenger, et comment Bezos parvient à le contrer (Zappos, Diappers.com).
Ce livre, c’est aussi l’histoire très personnelle de Bezos. Rien ne nous est épargné, et on y découvre l’envers du décor, la séparation de ses parents, comment il fut adopté comme un fils par le nouveau mari de sa mère, exilé cubain, le destin de son père biologique. Son éducation, sa volonté de changer le monde, ses projets personnels, son accident d’hélicoptère, son attention du moindre détail, ses colères ravageuses, ses méthodes de management.
Amazon est une entreprise passionnante, qui bouscule les conventions, fait un usage immodéré des « optimisations fiscales », et remet en cause les modèles économiques. Certains prétendent même qu’elle détruit de la valeur, mais je ne le pense pas, je suis plutôt convaincu qu’elle contribue à mettre en place de nouveaux ordres économiques, qui nécessitent une réadaptation de certains acteurs, endormis sur leurs niches. Tout comme l’automobile à mit un terme aux voitures à chevaux, Amazon fera sans doute disparaître des métiers, des entreprises, mais au profit d’autres métiers et d’autres entreprises qui sauront profiter de l’écosystème qu’elle engendre. Je me souviens, dès les premiers mois d’existence de Golfworld, avoir profité du modèle Amazon, en devenant un des premiers partenaires en France – j’ai même conservé le t-shirt qu’on recevait alors en guise de remerciement. Comme des millions d’autres individus, je dispose d’un compte vendeur qui me permet de revendre des ouvrages que je n’ai plus envie de conserver: comme le dit mon épouse, au prix du m2 en région parisienne, il faut savoir se débarrasser de certains livres.
Amazon, c’est l’une des premières entreprises à avoir fait du web 2.0, du web social autrement dit, en permettant aux consommateurs de noter et commenter leurs achats. Peu de sites, à cette époque de la fin des années 90, avaient fait ce pari et étaient prêts à prendre de tels risques. Aujourd’hui, c’est devenu un standard du web. Et l’on peu même lire les commentaires – pas tendres – laissés par McKenzie, l’épouse de Bezos, sur le livre lui-même… sur Amazon.com bien sûr, dans une sorte de mise en abyme digitale.
Amazon, c’est aussi l’un des pionniers du « Cloud », avec une offre qui n’a cessé de s’améliorer au fil de l’eau, et qui est devenue l’offre préférée de milliers de startups à la recherche d’hébergements à la tarification dynamique.
Bref, vous l’avez compris, je suis un grand fan de cette entreprise et de ses idées. Et comme d’autres, j’ai pris goût au Kindle (même si cela pose un problème aigu pour les juifs orthodoxes, privés de lecture le shabbat…). Comble de « l’Amazonisme », j’ai lu ce livre … sur l’application Kindle pour Android, qui fonctionne parfaitement (prix: $9.32…). Mais vous n’êtes pas obligés de faire comme moi!
Sur le même livre, d’autres recensions intéressantes par Manuel Diaz, Christophe Lachnitt.
PS: les fidèles lecteurs du canard enchaîné ne m’en voudront pas pour avoir repris pour titre celui d’une célèbre page intérieure du palmipède. Le lien avec le logo d’Amazon était trop fort pour ne pas tenter le calembour.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
On peut « détruire de la valeur » et avoir l’effet de remise en cause dont tu parles.
Amazon a une rentabilité ridicule, en dépit d’une extraordinaire « optimisation fiscale ». Or, sa valorisation est 20 fois celle de l’entreprise américaine moyenne, alors que les cours sont exceptionnellement élevés aux USA (quasiment deux fois les nôtres)… Bref, cela a toutes les caractéristiques d’une bulle. Amazon est-il durable ?
Cette destruction a forcé les acteurs installés à réagir. Elle a aussi été fatale à beaucoup de monde. Et là, il est difficile de mesurer les pertes.
Comme on le dit au MIT « hack the system ». Vive les pirates. C’est la philosophie de Goldman Sachs, des oligarques russes, et de ceux qui ont profité des changements récents. Mais pas forcément du gros de la population. Car il a beaucoup perdu.
Je te trouve bien sévère avec Amazon… 🙂
Rentabilité ridicule certes, mais en regard d’une politique d’investissement tous azimuts, est-ce un problème? Une entreprise qui ne cherche pas la rentabilité à outrance, mais plutôt la satisfaction de ses clients, n’est-ce pas respectable?
Merci pour la mention Hervé. Je suis aussi un vrai fan comme toi. J’avais raté le commentaire de sa femme sur le livre, un grand moment 🙂