Alexandre Adler
Normalien, journaliste, écrivain, spécialiste des relations internationales et notamment de l’union soviétique, Alexandre Adler laisse une trace particulière dans ma mémoire. Je me souviens en effet de ce qui a dû être sa première apparition à la télévision, c’était en 1983, à l’occasion de la crise entre l’URSS et la France, liée à l’affaire Farewell. Une cinquantaine de ressortissants soviétiques avaient été expulsés au printemps 1983, et cela avait fait les titres des journaux, on ne comprenait pas pourquoi et dans quel cadre.
Et je me souviens très bien que lors du journal télévisé de la mi-journée, sur la 2e chaîne je crois, on vit apparaître un bonhomme à la mine sympathique, un peu rondouillet, qui expliquait doctement ce qui avait provoqué cette expulsion. Bien entendu, je ne me souviens absolument pas des propos tenus par ce personnage, mais je me souviens parfaitement de son nom : Alexandre Adler. C’était la première fois que je voyais apparaître un expert d’origine juive à la télévision, qui plus est sur un sujet sérieux.
Des experts à la télévision, on en voyait déjà quelques uns, surtout le sémillant Michel Chevalet, l’expert des sujets liés à l’espace ou à l’aéronautique. Mais des experts d’un pays et d’un seul, je ne me souviens pas en avoir vu d’autres. D’ailleurs cette étiquette lui colla probablement un peu trop à la peau.
En soi, Alexandre Adler n’était pas expert que d’un seul pays. Il pouvait parler d’un tas d’autres sujets, avec son style si particulier. Il était un précurseur, un pionnier de l’expertise télévisuelle. Un dinosaure aussi. De nos jours, les experts auto-proclamés ou non campent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, dans les studios des chaînes d’info en continu. Ad nauseam.
Je ne crois pas qu’Alexandre Adler était fait pour ce format là. On le conviait pour éclairer un point, voilà tout. Pas pour meubler l’agenda de la ménagère de moins de cinquante ans. Le seul reproche qu’on peut formuler à son égard, c’est que son expertise ne lui ait pas permis d’anticiper les changements majeurs intervenus justement dans ce pays, en un peu plus de trente ans. Il n’a pas vu venir le putsch de 1991, ni l’ascension de Poutine. Comme tout expert qui se respecte, c’était un spécialiste de l’analyse des événements passés. Pas de l’anticipation des événements à venir.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec