Abominable digital
Du point de vue de l’étymologie, est abominable ce dont on s’écarte et qu’on rejette parce que de mauvais augure, ce qui ne présage rien de bon. Et bien de plus en plus, il m’arrive de trouver le digital abominable. Et pourtant, j’ai baigné dedans depuis bien longtemps, et j’en ai été l’un des promoteurs irréductibles. Mais il me semble que depuis quelques temps, on a atteint le seuil de l’abominable.
Des exemples? Je n’ai qu’à ouvrir mon ordinateur, lancer un navigateur, me connecter à LinkedIn, et compter les invitations quotidiennes qui n’ont ni queue ni tête, provenant d’individus que je ne connais pas, que je ne connaîtrai probablement jamais, et dont l’activité ne m’intéresse guère. Coaches en tout genre, commerciaux oeuvrant dans des entreprises de service offshore, responsables de ceci ou head de cela. Et quand bien même laisseraient-ils un message d’invitation aussi standardisé que fade, du genre « j’ai constaté que nous partageons de nombreuses connaissances, joignons donc nos réseaux« , je n’ai aucunement l’intention de leur répondre positivement. Leurs invitations ne sont rien d’autre que du spam.
Et s’il n’y avait que cela. Mais allons faire un tour du côté des emails. Depuis quelques mois, prolifèrent les emails en provenance de plateformes de marketing automation. J’en ai déjà parlé il y a quelques mois, suite à un échange avec Yann Gourvennec. En théorie, c’est simple et efficace. En pratique, c’est un agacement permanent, comme cette série d’emails reçus entre le 12 et le 18 décembre. La mention même du nom de l’agence – blogangels – exprime bien le fait que cet individu ne s’intéresse absolument pas à moi ni à mon activité. Il n’en a que pour mon mail (et mon argent)
Ou encore ces groupes WhatsApp dans lesquels on vous inscrit d’office. Bien sûr, je pourrais décider de désactiver cette fonctionnalité. Mais je ne le fais pas, parce qu’il m’arrive parfois d’être intégré dans un groupe intéressant. Pourquoi devrais-je me priver d’une fonctionnalité utile, au prétexte qu’elle est utilisée de manière incorrecte par des dizaines d’individus?
Le digital, lorsqu’il est pratiqué à outrance, mène à des usages incohérents, stupides ou énervants. C’est en cela qu’il devient abominable.
Découvrez d'autres articles sur ce thème...
Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Il y a quelques années, j’ai découvert qu’il y avait une nouvelle mode de management : le « no touch ». L’idée, apparemment, est qu’il n’y a plus besoin d’homme dans la relation commerciale. D’ailleurs tout n’est-il pas « digital » ? Du coup, du fait du bombardement idiot qui en résulte, plus personne ne répond à personne. Jamais les liens de confiance n’ont été aussi importants.