A la découverte de David Ogilvy
Sur les conseils d’un ami, je suis parti à la découverte de la vie et surtout des livres de David Ogilvy. Des livres passionnants. Derrière le portrait d’un des plus célèbres patron d’agences publicitaires, on y découvre un individu à la personnalité étonnante, dense, formidable catalyseur de talents. Loin d’être le type un peu superficiel auquel nous font penser d’autres personnalités de la pub de ce côté-ci de l’hexagone, Ogilvy était un homme entier, construit autour de convictions fortes, qui méritent l’attention non seulement de mes lecteurs intéressés par la publicité et la communication, mais n’importe quel manager ou chef d’entreprise.
Comment identifier la big idea, si chère à tous les communicants? Voici quelques clés:
- Est-ce que vous avez suffoqué lorsque vous l’avez-vue? Une idée de génie produit des effets sur votre métabolisme, comme une drogue ou une envie urgente: mains moites, accélération cardiaque, manque d’oxygène…
- Auriez-vous souhaité en être l’auteur? Une idée de génie rend jaloux, c’est une réalité à laquelle il faudra vous faire.
- Est-elle unique? Non seulement vous ne devriez-pas essayer d’imiter les autres, mais en plus vous devriez chercher un axe qui fasse que personne ne pourrait vous prendre la même idée.
- Est-elle adapté à la stratégie à la perfection? Il ne doit y avoir rien à ajouter… ni à retirer.
- Pourrait-elle marcher pendant trente ans? Oui, Ogilvy croit dans l’intemporalité des idées de génie. Ce n’est pas donné de nos jours.
David Ogilvy a horreur des comités. Autrement dit des réunions. Les comités savent critiquer, mais ne savent pas produire. La créativité – et encore, le mot est galvaudé selon lui – est l’affaire d’un seul homme. C’est une idée forte, et qui va à rebours des concepts actuels, qui valorisent avant tout le travail d’équipe.
Ogilvy à beau se prétendre un piètre leader, il fournit nombre de conseils à l’intention du véritable leader qui ont tout l’air d’être tirés de son expérience personnelle. David ogilvy, a, par exemple, horreur des « politiciens », de ceux qui bavent sur leur collègue. Mais il fournit une méthode originale pour combattre ce fléau: s’il recommande de virer les pires politiciens, il recommande de régler à l’amiable, en face-à-face tous les litiges, et les repas entre collègues, pour transformer l’état d’esprit. Et bien entendu, il nous recommande de ne pas sombrer, nous-mêmes, chefs d’entreprise, dans une approche de diviser pour mieux régner: cela ne ferait qu’accélérer le déclin.
Il y aurait tant à dire sur l’approche du leadership que préconise Ogilvy. le vrai leader déborde d’un optimisme communicatif, de combattivité, même après la défaite, de capacité de décision. Fait intéressant, il rappelle qu’on peut être un bon leader pour une certaine taille d’entreprise et un mauvais pour une autre (et pas nécessairement celle qu’on croit).
David Ogilvy a une approche saine de la gestion d’une agence. Il n’est pas favorable à la distribution de dividendes. Mais que faire des revenus de l’agence? Il n’est pas favorable non plus à la croissance externe: le rachat d’une autre agence est un pari complexe, sur la culture des entreprises, la durabilité de leurs contrats et sur la viabilité de la greffe: trop risqué. Il préfère ouvrir de nouveaux bureaux (même si cela coûte de l’argent), acheter ses bureaux (ce qui est presque toujours un bon investissement), ou se faire des réserves pour les temps difficiles.
David Ogilvy mettait un point d’honneur à utiliser les produits dont son entreprise vantait les mérites. Au-delà de l’honnêteté intellectuelle de l’approche, on ne peut que louer cette initiative, qui met l’agence – et son dirigeant – à la meilleure place pour identifier les forces et les faiblesses des produits en question. Le rapport qu’Ogilvy entretenait avec Rolls-Royce, et comment il mit fin à cette relation, en disent long sur une telle attitude.
Ogilvy dorait, semble-t-il, faire des listes. Liste de caractéristiques, liste de conseils, liste de choses à éviter, etc. Vous en trouverez dans chacun de ses livres, et c’est assez étonnant.
Voilà, j’en ai assez dit, j’espère avoir aiguisé votre curiosité. Pour en savoir plus, voici trois livres que vous pouvez vous procurer facilement via Amazon, et dont vous ne regretterez certainement pas la lecture.
- Confessions of an advertising man. L’autobiographie d’Ogilvy, écrite dans les années 60.
- Ogilvy on advertising. Moins aride que le précent et abondamment illustré, il en reprend certaisn éléments, mais avec plus de recul.
- The unpublished David Ogilvy. Le plus intrigant des trois mais non le moins intéressant, ce livre a été élaboré par les anciens collaborateurs d’Ogilvy, dans plusieurs des agences du groupe Ogilvy & Mather, à partir de notes, de courriers, de discours prononcés par David Ogilvy. On y découvre d’autres facettes de ce personnage, dont une émouvante interview pour ses 75 ans.
Découvrez d'autres articles sur ce thème...
Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Tout à fait d’accord sur l’empreinte unique qu’a laissé Ogilvy sur la pub;
Un autre excellent bouquin : « La Publicité selon Ogilvy » chez Dunod;
A noter que si nous pensons qu’il est un des meilleurs publicitaires de tous les temps, lui-même disait que son maître à penser était Raymond Rubicam.
Sans oublier Gallup, chez qui il développe son goût pour les études
suite au post précédent : « la publicité selon Ogilvy » n’est que la traduction de « ogilvy on advertising » mentionné par Hervé. Dont acte 🙂